Zombie - Les morts vivants au cinéma

/ Dossier - écrit par Lestat, le 02/01/2005

Tags : zombies film zombie morts vivants cinema horreur

Dossier complet sur les morts vivants au cinéma, de 1932 à 2005...

Ils viennent te chercher, Barbara...

Le Mort Vivant est partout. Il erre, bras ballants ou ventre à terre, dans le seul but de nous croquer le cerveau. Ses origines sont ancestrales, issues du "Zombie" du culte Vaudou qui enflamma bon nombre d'auteurs. Que ce soit pour nous faire mourir de peur ou de rire, comédies gores ou histoires d'amour impossible, le cinéma peu après la littérature, dès son âge d'or, s'est emparé du mythe. Plus que toute autre forme d'art, il l'aura fait évoluer, lui aura donné ses lettres de noblesse. Petit retour sur ce qui est devenu un genre à part entière, au même titre que le film de vampire ou d'extraterrestres.

Pour des questions de simplicité, il sera considéré ici que Zombie et Mort Vivant sont synonymes, même si, sans aucun doute, c'est d'un point de vue étymologique faux.

Un peu de mythologie...


Avant tout, qu'appelle-t-on un "Zombie". Un bonhomme tout bleu qui déambule dans un grand magasin ? C'est déjà se placer loin de la réalité que de voir dans le Mort Vivant l'imagerie popularisée par Romero. Pour revenir aux origines du Zombie, il faut se replonger dans les racines du culte Vaudou.
Plus qu'une croyance ou qu'une quelconque pratique de rites éparses, le Vaudou est une religion à part entière, dont les origines se retrouvent en Afrique et plus particulièrement au Bénin. Avec l'esclavage, les croyances ont émigré jusqu'à la terre qui leurs sont aujourd'hui rattachées : Haïti. Religion polythéiste mêlant plusieurs divinités de cultes différents (Fon, Yorouba et dahoméens pour ne citer qu'eux), le Vaudou est composée de très riches variations, dont la facette la plus connue ou tout du moins la plus médiatisée reste sans doute la Macumba : la magie noire du Vaudou. Basée sur une généalogie de divinités, le Vaudou en temps que tel comprend également une série de rites destinés à célébrer et honorer les Loas, les représentations des dieux concernés. Dieux, mais aussi esprits ou génies. De tout le panthéon vaudou, la figure la plus connue reste bien sur le fameux Baron Samedi, dieu de la mort et des cimetières, parfois comparé à "notre" Satan. Enfin, il est intéressant de signaler qu'à une certaine époque, le Vaudou autorisait le cannibalisme.

Et le Zombie dans tout ça ? C'est ici qu'intervient la branche de la Magie Noire, qui fascine par ses sacrifices sanglants et ses transformations mystérieuses. Ainsi, il est un fait reconnu que certaines pratiquants du Vaudou se transforment en Loup-Garou. Quand au Mort Vivant, après avoir été longtemps considéré au sens littéral de son appellation, soit un cadavre qui se relève et marche, sa vraie nature fut révélée par l'ethno-botaniste Wade Davis. Rien de bien surnaturel ici, ce que l'on appelle Zombie est au sens premier un homme drogué et réduit en esclavage par un houngan -un prêtre vaudou-. La drogue utilisée, composée entre autres d'ossements humains, de reptiles, de batraciens ainsi que d'une toxine contenue dans le poison du poisson-globe, à pour double effet d'anéantir toute volonté et de donner l'apparence de la mort. Après un enterrement sommaire, le houngan n'a plus qu'à déterrer la victime et la ranimer, afin que celle-ci le serve. Le vol ou l'enlèvement sont également des justifications plausibles à la zombification.

Le Mort Vivant traditionnel


Il fallait bien un petit exposé sur le Vaudou pour aborder le vif du sujet. Car les premiers films de Morts Vivants s'intéressent précisément à ce type de culte, allant jusqu'à en reprendre méticuleusement les constantes. Le premier Zombie-Movie de l'histoire reste sans doute White Zombie, réalisé en 1932 par Victor Halperin. Parfois appelé Fright Night ou encore Les Morts Vivants chez nous, White Zombie prend place à Haïti où une jeune femme se fait envoûter par un homme mystérieux (Bela Lugosi, au sommet de son art), afin de satisfaire un planteur, tombé éperdument amoureux. D'une approche très théâtral, White Zombie en impose toujours par son ambiance étrange, sa musique de choeurs africains et les audaces qu'il développe pour son époque. Nous sommes ici moins dans un pur film d'épouvante que dans un drame, avec ses personnages travaillés et son sujet fataliste. Dans un sens, le film renvoie aux prémices du film gothique tel qu'Universal l'a développé, avec ses créatures davantage pathétiques qu'effrayantes. Reste que White Zombie développe toujours une aura inquiétante, montrant des ouvriers zombifiés, oeuvrant mécaniquement dans une usine de sucre. Les Zombies d'Halperin sont lents, muets, totalement dévoués à leur créateur et maître dont ils remplissent les basses besognes. Nous sommes ici dans la grande tradition du Vaudou, où des hommes se retrouvent à l'état d'avilissement après avoir inhalé une mystérieuse poudre. A cela, le film rajoute d'autres éléments paranormaux, tels l'hypnose, mêlant ainsi deux cultures de la possession. White Zombie malgré quelques longueurs inhérentes à ses partis-pris reste toujours un film superbe et le chef de file d'un genre cinématographiquement en pleine naissance. Et ses rejetons ne se feront pas attendre.

De Vaudou et d'amours maudits, il en sera également question dans Ouanga (George Terwilliger, 1935), dans I Walked with a Zombie (aka Vaudou, Jacques Tourneur, 1943) ou encore dans Voodoo Man en 1944. Autant de films à la trame quasi-similaire, où le Mort Vivant prend sa source dans la profonde mythologie haïtienne. Depuis, le genre n'a cessé de faire des allez et venues entre la tradition et le modernisme. En parallèle des différents courants qui le traversa, il y a toujours un ou deux films qui mettent un point d'honneur à revenir aux racines. Comédie plutôt lourde, Zombie on Brodaway (1944) envoie deux énergumènes aux Caraïbes, à la recherche d'un véritable Zombie afin d'assurer la promo d'un Night Club. Des Caraïbes, historiquement un des principal foyer de la Macumba, il en est également question en 1979 dans l'Enfer des Zombies. Faisant fi du contexte urbain cher à Romero, Lucio Fulci exile ainsi ses morts vivants sur l'île de Matool. Durant les années 50, en pleine vague de ce que nous appellerons le "Zombie Spatial" (où la métamorphose est d'origine extraterrestre), propice à une petite montagne de films dont le terrible Plan 9 From Outer Space d'Ed Wood (1956), on revient aux sources avec Voodoo Island ou The Curse of Doll People. Plus proche de nous, Wes Craven réalise en 1988 ce qui deviendra son meilleur film et l'une des meilleures incursions dans le genre, à savoir l'Emprise des Ténèbres.

Dans tous ces films, il faut reconnaître que ce n'est pas le Mort Vivant la véritable menace de l'histoire, mais bien la folie des hommes. De Bela Lugosi, impérial en grand Maître vaudou, au fanatique policier de l'Emprise des Ténèbres, les Zombies prennent davantage un statut de victimes tragiques, endoctrinées contre leur gré par des têtes pensantes aux lourds projets. Or le Mort Vivant par définition se doit de représenter la peur ultime, celle de la mort qui marche, immortelle et inexorable. Une entité sans pensées, sans réflexions, sans âmes, une machine à tuer qui passe de l'un à l'autre, sans s'arrêter ni se fatiguer. La tuer représente un acte d'exorcisme face à ses propres peurs, s'affranchir physiquement de la Mort en la combattant. Pour que le Zombie devienne un monstre à part entière, réceptacle des cauchemars des spectateurs, il lui fallait sortir lui même de sa condition, devenir autonome, acquérir de nouvelles facultés. En cela, la mode du Zombie Spatial aura fait un pas en avant. Mais la grande révolution arrivera par Romero, avec l'apparition du Zombie cannibale.

Le Zombie cannibale


L'image est devenue cliché. Un être décharné tend les bras vers sa victime terrorisée pour d'un coup de dent lui ouvrir le crâne et lui dévorer le cerveau. Nous avons vu qu'il n'en a pas toujours été ainsi. Quand en 1968 George Romero sort La Nuit des Morts Vivants, il fait bien plus que relancer le genre, il le révolutionne en profondeur. Si sur grand écran le cannibalisme est déjà connu, y associer le mythe du Mort Vivant relève pour le coup de l'inédit et s'avère tout à fait cohérent avec l'ambiance quasi-mystique du Zombie vaudou.

Car si Romero avait comme idée de symboliser une nouvelle société dévorant littéralement l'ancienne, le cannibalisme en soit est également un immense moteur de fascination et de dégoût. Que peut on dire sur l'acte de manger de l'humain, de se manger finalement soi-même ? Cette pratique permis à une équipe de rugby d'échapper à la mort, lors d'un célèbre et sordide fait-divers durant les années 70. Le cannibalisme aura souvent été la solution désespérée mais efficace à quelques famines en France, durant les années noires du Moyen Âge. "C'est dégueulasse", serait-on tentés de crier. Même pas, dit-on : selon les témoignages, il paraîtrait que la chair humaine cuite est plus tendre que celle du porc. Pas de doutes, le cannibalisme est comme tout les tabous, entouré de quelques histoires et d'une bonne part d'attirance perverse. En outre, se faire dévorer par ses semblable représente un stade de menace incomparable, un acte interdit et insensé. Le cannibale se place ainsi hors des normes et en cela entretient une part d'attirance par sa liberté de toute lois et de toute morales. Le Mort Vivant, en devenant cannibale, franchis ainsi un nouvel échelon dans la peur qu'il inspire, mais aussi dans sa part de magnétisme. De simple victime quasi-inoffensive, il devient une sorte de prédateur froid dont le danger n'est plus explicite mais devint petit à petit implicite. Qu'il court ou se traîne, le seul but que l'on lui reconnaisse désormais, avant même qu'il ne passe à l'acte, est de déchirer la chair fraîche pour s'en sustenter. Il a désormais un objectif. Il agit de lui même, poussé par une faim que lui seul peut comprendre. Le spectateur quand à lui est partagé entre craindre et comprendre cette faim et en cela, le Zombie n'a jamais été manichéen. Il représente le danger, le mal parfois, mais n'EST pas le mal car quelque soit le degré d'évolution du Mort Vivant, il n'est jamais et ne sortira jamais complètement de sa place de victime. Auparavant victime d'un être supérieur, il est à présent victime de sa propre nature, de sa propre faim. "Manger le cerveau apaise la douleur de la mort", dit une femme-zombie dans le Retour des Morts Vivants. "Il me mange, il ne fait rien de mal", proteste une infortunée jeune fille dans Dellamorte Dellamore pendant que son petit ami revenu d'entre les morts s'offre quelques morceaux de choix.

Si Romero aura recours à l'artifice du cannibalisme pour les besoins de ses thématiques, il va créer une nouvelle tendance qui convient fort bien aux critères commerciaux. Car avec le cannibalisme arrive aussi la notion de gore dans le Zombie-Movie, permettant des excès visuels sans précédents. Ne reste plus qu'aux Morts Vivants de voyager un peu...

L'apogée du Zombie-Movie : L'Italie


Avec les films de Romero, le Mort Vivant prend une bonne part de ses caractéristiques finales. Cannibale, il en devient également plus véloce comparé aux prémices du genre, où les créatures se mouvaient avec une lenteur désespérante. Toutefois, aucun encore ne court le 100 mètres -point qui sera abordé plus après-. Reste que niveau physique, il manque quelque chose. Qu'ils soient, hormis leur démarches, sans signes distinctifs dans la Nuit des Morts Vivants, couleur schtroumpf dans Zombie -Dawn of the Dead ou jaunâtre et ridé dans le Jour des Morts Vivants, le Zombie n'a pas l'air fraîchement sortie de la tombe. Pour cela, malgré quelques sursauts de-ci de-là, il faudra attendre que le genre s'exile, de gré ou de force, chez les artisans italiens qui à force de putréfaction, de vermines et de brûlures, donneront aux monstres un air déterré bien peu ragoûtant. C'est aussi en Italie que le Zombie Movie passera par des innovations incroyables, des audaces insensées qui n'auront pour limites que la propre folie des réalisateurs.


L'Italie et le Mort Vivant, c'est une histoire qui ne date pas d'hier. Aux grandes heures du Péplum sortait déjà d'étranges hybrides tels qu'Hercule contre les Vampires (Mario Bava) ou Maciste contre le Fantôme (Giacomo Gentillomo). Nous sommes ici au début des années 60. Quand la Nuit des Morts Vivants passe par là, l'impact ne se fait pas tellement sentir, les réalisateurs s'occupant plutôt dans la fin du western, le début du giallo, la comédie ou le fantastique gothique. Le Raz de Marée débutera en 1978, avec Zombie-Dawn of the Dead. Premier à mettre les pieds dans le plat de viande putréfiée, Lucio Fulci sort L'Enfer des Zombies en 1979. Déjà, les caractéristiques du Zombie Italien sont là : cannibale bien entendu, gore car c'est bien mieux et bien pourri, c'est tellement plus joli. Les Zombies de Fulci sont enterrés depuis pas mal de temps, aussi quand ils sortent de terre, c'est dans un état plus que défraîchis. Jusqu'au-boutiste, Fulci mettra en scène dans l'Au Delà (1981) des cadavres se réveillant directement à la morgue et c'est peu dire qu'ils sont abîmés. Un style qui fera école, en Italie, puis partout ailleurs. Zombie 3, de Fulci/Mattei (1988) reprend également le principe en rajoutant une touche d'acné purulente. Mattei toujours, dont les films sont aussi gores que mauvais, avait déjà pour sa part en 1981 mixé les aspects brûlures/boutons dans le très ringard Virus Cannibale. De textures "imitation brûlure", il en est également question chez le prolifique Umberto Lenzi, toujours en 1981 décidément, dans L'Avion de l'Apocalypse. Plus Z que B, L'Avion de l'Apocalypse a pour lui de présenter les premiers spécimens de Morts Vivants qui courent ! Sorte de précurseur du 28 jours plus tard de Danny Boyle, le film aurait eu de quoi devenir un classique, mais ce sera sans compter l'économie de moyens. Du fait, pas de chance pour Lenzi, en fait de grands brûlés ses Zombies semblent plutôt être tombés dans la gadoue...En 1985, Lamberto Bava lâche sa réponse à Evil Dead : Démons. Film au sous genre un peu incertain, Démons nous montre des choses assez cradingues n'ayant plus beaucoup de rapports avec l'humain. 1994, Michele Soavi sort ce qui restera le chant du cygne du film de Zombie italien : le superbe et envoûtant Dellamorte Dellamore. Soavi emprunte ici autant à l'école Romero qu'à celle de Fulci, avec un design plutôt sobre où malgré quelques insectes nécrophages, les dégâts ne sont pas post mortem mais vestiges d'une vie passée.

Mais les innovations ne s'arrêtent pas là. Avec l'Italie, c'est le début des versus déjantés et des mélanges plus ou moins barbares de thèmes. Dans l'Enfer des Zombies, Fulci nous mixe du Mort Vivant avec un soupçon de Jaws, lors de la célèbre séquence où une créature se trouve confrontée avec un Grand Blanc. Les logiques commerciales étant ce qu'elles sont, l'érotisme ou le sexe fait son apparition dans le genre, de manière plus ou moins importante selon les partis-pris des réalisateurs. Dans les films de Zombies portés sur la bagatelle, nous pouvons citer Exotic Love, de, quel grand hasard, Joe d'Amato. Mais la fusion la plus folle restera sans doute ce Zombie Holocaust, alias la Terreur des Zombies, mis en boite par Marino Girolami (planqué sous le pseudo de Franck Martin) et motivé par le producteur de l'époque, Frederico de Angelis. Nous sommes en 1980, un an plutôt sortait successivement Cannibal Holocaust de Deodato et l'Enfer des Zombies, tandis qu'en 78, c'était le film de Romero. Autant dire que Frederico de Angelis n'aura pas eu à chercher son sujet bien loin. Mêlant cannibales, zombies et stock-shots de l'Enfer des Zombies, Zombie Holocaust reste un gros Z bien gore, symptomatique des extravagances de cette époque de doux-dingues. Plus poétique qu'effrayant, Dellamorte Dellamore quand à lui oublie le gore qui caractérisait ses ancêtres et renoue avec la tradition de l'amour maudit, une forme de comique, mais aussi de drame mélancolique. Dellamorte Dellamore n'est pas tant une variation du Zombie Movie qu'un film profondément fantastique et féerique, parfois très gothique, où un personnage désabusé cherche sa place dans son microcosme. Un cas véritablement à part, au point qu'on ne peut en parler entièrement comme d'un film de Mort Vivant en tant que tel.

On peut clairement dire que le passage du Mort Vivant en terre italienne aura achever son intronisation dans la légende, malgré, il faut bien le dire, un paquet de nanars. Dans ce dossier, il est souvent question de productions américaines et italiennes. Ce sont un peu les deux mamelles du Zombie-Movie. Mais il convient à présent de voir d'autres contrées qui chacune à leur manière auront apporté et apportent toujours leur pierre à l'édifice.

Espagne


Entre les Léviathans du genre, on oublie souvent que l'Espagne possède une tradition très riche en matière de cinéma fantastique. Dictature franquiste et censure ont fait que seuls une poignée de ces films nous sont parvenus. Ceux de Jésus Franco ou de Louis Bunuel, généralement. Après une première percée au temps du muet, le cinéma fantastique espagnol et de genre en général s'effondre littéralement durant les années 60 sous la dictature pour renaître sous l'impulsion de Jésus Franco qui, avant de sombrer dans le nanar, aura été une figure locale du fantastique gothique. Il était également fréquent que certains réalisateurs italiens, tels que Mario Bava ou Giorgio Ferroni, s'entourent d'équipes espagnoles. Ferroni qui d'ailleurs propose avec la Nuit des Diables une variation autour du Mort Vivant modèle Romero. En Espagne, les Zombies ne courent pas les rues et le cas le plus connu reste sans doutes celui de Jorge Grau et de son film, le Massacre des Morts Vivants, variation tétanisante et pessimiste de la Nuit des Morts Vivants. Toutefois il est impossible de passer à côté de certains films de Franco, de Paul Naschy ou de la tétralogie des Templiers d'Amando de Ossorio, ce dernier étant peut être le seul réalisateur avec Jorge Grau à être associé directement au mythe.

Dès ses premiers films, Jésus Franco s'intéressa, quoique d'assez loin, au mythe du Mort Vivant. Son premier film, l'Horrible Dr Orloff (1961), particulièrement inspiré des Yeux Sans Visage de Franju, mettait déjà un domestique-zombie au service du docteur susnommé. Une caractéristiques qui deviendra cliché durant son début de carrière, tant Le Sadique Baron Von Klaus ou les Maîtresses du Dr Jeckyll se plaisaient à reprendre la même trame que celle de l'Horrible Dr Orloff. Le restant des apports de Jésus Franco au genre est hélas moins glorieux. Après Une Vierge chez les Morts Vivants en 1973, variation que nous qualifieront d'érotique, Franco commet en 1981 L'Abîme des Morts Vivants, film qui est resté dans l'histoire comme étant le pire film de Zombie jamais fait ! Pour en parler, rien de mieux que de laisser la parole au vénérable Jean Pierre Putters : "du gore plutôt soft, un érotisme soft, un scénario très soft lui aussi, sans parler des effets spéciaux renversants (...). On a beau se dire "ce n'est jamais que du Jésus Franco", ça laisse tout de même perplexe." (Zombie Story).

Pendant ce temps là, une autre figure du cinéma fantastique espagnol s'affaire également dans le genre. Il s'agit de Jacinto Molina, alias Paul Naschy, acteur qui en Espagne est au Loup Garou ce que Christopher Lee est à Dracula. On ne parlera pas ici de films réalisés par Naschy lui même, mais plutôt de films où il apparaît -quelque soit l'importance de son rôle- ou qu'il scénarise. Nous pouvons ainsi citer El Espanto Surge de la Tomba ou Latidos de Panico, où Naschy interprète un rôle récurant de sinistre personnage. Et les Morts Vivants dans tout ça ? Ils gravitent autour, avec plus ou moins de cohérence. Dans la Rebelion de la Muertas, en 1972, Naschy et le réalisateur Leon Klimovsky s'intéresse au Zombie féminin, sujet original pour un film qui ne restera pas dans les mémoires.

Si tout ceci reste relativement classique, les années 70 auront cependant livrés une saga assez atypique : celles des templiers maudits. Quatre épisodes sortis entre 1971 et 1975, où d'étranges templiers sortent de leur tombeaux, étendant leur malédiction sur un petit village. Oscillant entre des ambiances oniriques et des aspects tout ce qu'il y a de plus kitch, La Révolte des Morts Vivants, le Retour de Morts Vivants (El Ataque de los muertos sin ojos), Le Monde des Morts Vivants et l'ultime La Chevauchée des Morts Vivants, sans révolutionner quoi que ce soit apportent une originalité salutaire dans ce genre et se sont imposés à leur niveau tels des petits classiques, malgré quelques points récurrents ne jouant pas en leur faveur. Outre le fait que chaque film est une sorte de remake du précédent, à l'exception du Monde des Morts Vivants se plaçant à bord d'un galion hanté, et que le héros est au courant de tout mais se tourne généralement les pouces en attendant que ça se passe, l'élément le plus singulier de cette saga reste sans doute paradoxalement sa marque de fabrique : des chevaux fantômes galopant au ralenti. Sortant d'on ne sais où, servant aussi bien aux Templiers qu'à la sempiternelle fuite des héros, ces chevaux ne changeront jamais leur rythme d'un poil : ralenti pour tout le monde. La Saga des Templiers d'Ossorio malgré quelques anachronismes n'en reste pas moins ancrée dans le patrimoine historique espagnol et de part l'ambiance des films et le physique des Morts Vivants (lents, desséchés, rachitiques...) a fini par se faire sa place dans le cinéma d'horreur.

Il est intéressant de constater l'évolution du Zombie espagnol, qui ne s'est jamais réellement affranchi de sa fonction vengeresse ou esclavagiste. Les premières traces de Morts Vivants que l'on trouve chez Franco sonnent comme un respect des racines, avec ce domestique à la volonté annihilée qui prend une dimension tragique par quelques résurgences de conscience ou de sentiments. Lorsque la Nuit des Morts Vivants débarque en Espagne, le film de Zombie commence à prendre du poil de la bête et l'influence de Romero se fait sentir, bien que certaines caractéristiques soient évincées au profit d'élans plus personnels, le cannibalisme étant peu ou pas développé. On trouve toutefois chez Jorge Grau des constantes de Romero voir, pourquoi pas, du Fulci avant l'heure (nous sommes alors en 1974), ainsi que des scènes gores bien senties. En revanche, l'origine spatiale est plutôt boudée, au profit de la malédiction ou de la transformation par tierce personne. Niveau physique, les maquillages restent relativement sobres, les exceptions étant comme toujours Grau et Ossorio. Après l'arrivée de Zombie-Dawn of the Dead et des films de Fulci, Franco de son côté tente d'incorporer vers de terre et fonction de gardiens aux Nazis ressuscités de l'Abîme des Morts Vivants, mais peine perdue, au delà de la non-qualité du film, le cinéma fantastique espagnol entre alors en crise jusqu'aux années 2000. Aujourd'hui, il peut compter sur Alejandro Amenabar ou d'un Brian Yuzna nouvellement membre de la Fantastic Factory pour le remettre à pied d'oeuvre. Ce même Yuzna qui toujours en Espagne réalisa en 2003... Beyond Re-Animator, troisième volet des aventures du Dr West, réanimateur de cadavres de son état. Comme quoi, rien ne se perd.

Allemagne

Patrie de Murnau, de Fritz Lang, de Roland Emmerich (j'assume !) mais aussi nouveau bastion de la scène gore, l'Allemagne n'aura touché que du bout des doigts le film de Zombies, à travers des bandes fauchées et ultra sanglantes que nous devons à des réalisateurs fou-furieux tels Andreas Schnaas ou Olaf Ittenbach.


Andreas Schnaas et Olaf Ittenbach font partie de cette vague de réalisateurs dont les films sont principalement destinés au marché underground. Si aucun des deux n'a fait du Mort Vivant son monstre favori, il faut toutefois leur reconnaître une faculté à l'incorporer dans leurs délires plus gorissimes les uns que les autres. Dans le circuit vidéo, le père Schnaas commence toutefois par tomber dans le ridicule avec Zombie 90 (1990, donc ) et ses maquillages façons pizzas. Rassurez vous, il ne s'est pas fait mal et reviendra aux Morts Vivants avec Violent Shit 3, troisième volet de sa tétralogie extrême et de son personnage dégénéré, Karl le boucher. Dans Violent Shit 3 (1999), notre boucher Karl s'amuse à conquérir le monde avec l'aide de créatures zombifiées. Sous-titré Infantry of Doom, interdit en Angleterre, le film, visiblement tourné en vidéo aligne la tripaille d'épicerie et des morts vivants bien cradingues. Après d'autres excursions (Demonium, Antropophageous 2000...) Schnaas repart avec Nikos the Impaler (2003), une sorte de Violent Shit 4, où un tyran roumain se réveille d'entre les morts pour montrer de quel bois il se chauffe. Olaf Ittenbach de son côté n'est pas forcément plus subtil. De Premutos en 1997, où un ange déchu tente de conquérir le monde en réveillant les morts (original, non ?) à Legion of Dead en 2001 où un homme mystérieux créé une armée de Zombies, Ittenbach se dévoue à la noble cause du gore en livrant ce qui resteront comme les films les plus sanglants de l'histoire du cinéma. A ce niveau, Premutos n'a d'ailleurs rien à envier à Braindead et peut se vanter de comptabiliser à lui seul plus de morts que tous les Vendredi 13 réunis ! Du reste, il faut bien le dire, le taux de boyaux est bien le seul intérêt des films d'Ittenbach...

Et en France ?

Le cinéma fantastique et la France, ça n'a jamais été réellement une histoire d'amour. Très dommage, car notre beau pays peut se vanter de l'avoir inventé. C'était au tout début du cinéma, sous la caméra d'un certain Georges Méliès. Ces années passées, le genre est devenu quelque peu boudé au profit de productions plus conventionnelles, intronisant là notre belle tradition du polar ou de la comédie. Néanmoins, nous pouvons compter sur des réalisateurs comme Cocteau ou George Franju (Les Yeux sans Visage) pour se permettre des incursions réussies dans le gothique ou le merveilleux. En ce qui concerne les Zombies -et autres créatures-, peu de représentants, mais il faut toutefois rendre à Cesar ce qui appartient à Jean Rollin...


Jean Rollin est un personnage à part dans notre patrimoine cinématographique, sans doute parce qu'envers et contre tout, il se sera borné à faire des films d'horreur dont à l'époque pas grand monde ne voulait, incluant une imagerie bien à lui, généralement érotique. En 1968, il débarque après quelques courts métrages avec l'étrange Le Viol du Vampire. Un premier film de vampire pour un genre qui tient une certaine part dans son oeuvre, avec la Vampire Nue, le Frisson du Vampire ou Requiem pour un Vampire, respectivement 1969, 70 et 71. Après Lèvres de Sang en 1974, les affaires vont assez mal et comme il faut bien gagner sa croûte, Jean Rollin, sous le pseudo de Michel Gentil, se lance dans le cinéma pornographique, avec des titres particulièrement fleuris. Disons le, Jean Rollin n'a pas la réputation de réaliser des chefs d'oeuvre et ses films sont davantage qualifiés de barbants que de géniaux. Artisan honnête, apprécié Outre-Manche et comptant chez nous quelques bastions de fans, il faut en revanche lui reconnaître un univers visuel bien à lui et une certaine audace dans ses choix thématiques. La chance est avec nous, de ses films de Morts Vivants, deux seraient parmi ses plus réussis.
Dans Les Raisins de la Mort, les habitants d'un village viticole se transforment en Zombies après avoir bu un vin pas très clair issu de vignes dopées à l'insecticide. Film plutôt gore au sujet atypique (!), les Raisins de la Mort mêle érotisme et tripes à l'ancienne, tout en se payant les services de Brigitte Lahaie. Dans la Morte Vivante en 1978, Jean Rollin s'intéresse à la radioactivité. Celle-ci réveille une jeune fille fraîchement décédée, qui à peine levée va partir faire le ménage dans un film où l'on retrouve gore, érotisme et autres éléments chers à Rollin. Pour finir, c'est le cas de le dire, il faut citer l'épouvantable Lac des Morts Vivants en 1984, film de commande dont Rollin avoue toujours n'avoir pas lu une ligne de scénario co-réalisé avec Jésus Franco. Un film ennuyeux, véritable morceau de non-cinéma que les plus endurants n'apprécieront qu'en cherchant faux raccords, maquillages foireux et autres acteurs bafouillants.

Changeons de réalisateur et remontons un peu dans l'alphabet, car parfois, l'audace vient de là où l'on ne l'attendait pas. Ceci nous amène en 1982, année où sort une curieuse pièce dans la filmographie de Jean Pierre Mocky : Litan. Rythme lent, musique lancinante et scènes gores plutôt corsées, Litan est un film assez étrange où un couple cherche à s'échapper d'un village maudit pendant que se promène une fanfare d'individus troubles. Des Morts Vivants ? Peut être. Il y a dans Litan un climat et un esthétisme assez particulier, une certaine froideur doublée d'irréalité. Bien que farci de quelques longueurs et d'un tempo monacal, Litan mérite d'être redécouvert. Les maquillages sont sommaires, les Morts Vivants masqués, les effets spéciaux tout ce qu'il y a de plus basiques, pourtant la sauce prend et emmène tranquillement son spectateur jusqu'au générique final. Rafraîchissant.

Les Zombies venus d'ailleurs...

L'Amérique, l'Italie, la France, l'Allemagne, l'Espagne. Nous avons vu là les principaux pays exportateurs de Morts Vivants. Ce dossier n'a pas la vocation d'être exhaustif, mais pour bien finir le tour d'horizon, il fait encore citer quelques contrées.


Commençons par le continent asiatique. L'Asie est un cas un peu particulier, sans doutes parce que le Mort Vivant, sorti du Jiang Shi chinois (une sorte de fantôme-vampire-zombie), est là bas un pur produit né de l'influence occidental. Les Orientaux ont en effet une vision de la mort qui leur sont propres. Pour eux, ce phénomène fait partie du cycle de la vie, ils ne la craignent pas car elle fait partie du quotidien. En témoigne les petits autels qui ornent chaque maison, où l'on vient se recueillir pour vénérer la mémoire des défunts. Dans ce contexte, représenter la Mort qui marche tout en cherchant à la tuer physiquement est incohérent et ceci fait qu'en Asie en général, le Zombie n'existe pratiquement pas, à la différence des fantômes qui aujourd'hui font la gloire du cinéma d'horreur. Autant dire que les quelques réalisateurs s'étant lancés dans le film de Morts Vivants l'on fait généralement dans la bonne humeur et le Grand Guignol. A Hong Kong, on ouvre le bal en 1981 avec un Kung Fu Zombie, où un petit truand tente de se venger d'un rival en utilisant une armée de Morts Vivants. Hong Kong toujours, en 1991 nous pouvons compter sur Curse of Zombie, qui s'intéresse cette fois à la sorcellerie et à l'amour maudit. Retour aux sources inattendu pour un film qui ne restera pourtant pas dans les mémoires. 1998 redresse la barre avec Bio Zombie, film assez fun dont je ne peux que vous inviter à lire la critique de Vincent L. Souvent influencés par Romero, les films de Zombies asiatiques n'en mêlent pas moins les tendance occidentales avec leurs propres codes, leurs cultures, leurs humours, nous donnant des produits aussi jouissifs que le japonais Versus l'Ultime Guerrier. Véritable foire d'empoigne décomplexée et très gore, Versus aura fait son petit effet lors de sa sortie en 1999. Entre deux scènes de castagne, trois lignes de scénario nous font suivre les tribulations d'un prisonnier évadé et d'une bande de mafieux dans une forêt magique où s'éveillent des Morts Vivants tout bleus. Un prétexte qui en vaut un autre pour du bourrinage et du plaisir à l'état pur, tant l'ensemble est nerveux et bien enlevé.

Autre continent autres moeurs, l'Australie nous aura également livré quelques joyeusetés. En 1999 le monde verra ainsi débarquer un Zombie Brigade dont on ne sait pas grand chose. 2002 est l'année de la récidive pour les frères Spierig. Déjà responsables d'une charmante trilogie comprenant un Attack of the Undead, un Rampage of the Undead et un Massacre of the Undead, ils remettent ainsi le couvert avec un...Undead ! On ne change pas une équipe qui gagne. Bon il faut dire ce qui est, Undead est un produit furieusement con qui se raccroche aux branches par son quota de gore et de débilité profonde.

Au Mexique, on fera plus fin, en s'intéressant au Vaudou ou en s'éparpillant dans une tradition plus gothique. Là bas, les Morts Vivants sont une histoire qui date grosso modo de la fin des années 50, avec des films comme El Monstruo Resucitado (53) puis des années 60 avec The Curse of Doll People précédemment cité, Munecos Infernales (60) ou la Muerte Vivente (68). Restons dans le coin avec l'Argentine, qui nous aura livré le très saignant Plaga Zombie en 1997 et sa suite, Plaga Zombie : Zona Mutante, deux films gores assez fauchées mais assez fendards.

Au Canada, ça ne rigole plus, car nous pouvons compter sur Bob Clark. Bob Clark qui en 1974 s'attaque à un plaidoyer contre la Guerre du Vietnam avec son émouvant Le Mort Vivant (Deathdream). Film très noir et desespéré, Le Mort Vivant nous narre le retour d'un soldat dans sa famille, à la grande stupéfaction de celle-ci : fiston a pourtant été déclaré mort au front... Sans doute avec Simetierre et Moi Zombie, Chronique d'une douleur, l'un des films les plus tristes et pessimistes sur le sujet. Mais l'oeuvre de Bob Clark ne s'arrête pas là : en 1973, notre homme avait déjà sorti Children Shouldn't Play With Dead Things, alias Zreaks, plus traditionnel.

Plus près de chez nous, la Belgique montre qu'elle n'est pas la dernière pour la déconne avec Rabid Grannies, alias les Mémés Cannibales (!!), tandis que l'Angleterre nous propose la parodie/hommage Shaun of the Dead. L'Angleterre qui de part la Hammer (un seul film, l'Invasion des Morts Vivants en 66) aura également laissé sa marque dans le genre, dans le registre traditionnel du Vaudou, sans oublier 28 Jours plus Tard de Danny Boyle qui paye son tribut aux classiques du genre tout en s'intéressant à un virus néfaste.

Le Zombie Nazi

Le film de Mort Vivant s'est au fur et à mesure doté de plusieurs variantes. La fibre comique, la fibre gore, la fibre pathétique... On peut clairement dire que le genre passe du rire aux larmes. Même si il serait intéressant de tous les citer, de décortiquer au passage des réalisateurs comme Bob Clark ou Dan O'Bannon et des films tels que Simetierre, Moi Zombie Chronique d'une douleur ou Flic ou Zombie, il est préférable de sa cantonner à un sous-genre en particulier, soit ici l'étrange cas du Zombie Nazi. Qu'on se rassure, une appellation qui dans le cas présent ne sert qu'à montrer des Morts Vivants en uniforme.


Difficile de dire si le Zombie Nazi est ou non un sous-genre à part entière, tant ses représentants se comptent sur les doigts de la main. Tentative efficace de renouveler le mythe, le Nazisme était le parallèle rêvé pour définir une nouvelle symbolique du mal. A mille lieux des délires glauques et nauséeux du mouvement Nazisploitation, les quelques films de Zombies Nazis existant apportent un indéniable lot de fraîcheur à un genre en train de se cloisonner. Pour le meilleur et pour le pire, hélas. On ne reviendra pas sur l'Abîme des Morts Vivants et le Lac des Morts Vivants, qui tout en étant parmi les rares membres de cette catégorie, en sont sans doutes les moins glorieux.
Durant les années 40, les scénaristes aimaient déjà à introduire dans leurs histoires des savants allemands se construisant une armée immortelle pour le compte de la Wehrmacht, petit artifice pour apporter un peu d'originalité dans la vague Vaudou. Sans doutes les prémices du Zombie Nazi, avec des films tels que King of Zombies en 1941 ou Revenge of the Zombies en 1943. Un remous qui n'aura semble t'il pas perduré. Il faudra attendre les années 70 pour voir apparaître sans doute le film phare de cette catégorie, j'ai nommé Shock Waves en 1970. Réalisé par Ken Wiederhorn, qui plus tard s'attaquera au Retour des Morts Vivants 2, Shock Waves, retiré chez nous d'un bien nanar Le Commando des Morts Vivants, nous fait suivre les mésaventures d'une équipe de naufragés, perdu sur une île où se promène un commando de Zombies créés par l'armée allemande. Qu'on ne s'y méprenne pas, malgré son sujet à la limite du dadaïsme, Shock Waves est une série B efficace tout ce qu'il y a de plus sérieuse, nantis de la présence de deux vieux routiers du genre, j'ai nommé John Carradine et Peter Cushing. Ambiance incertaine et scènes inoubliables caractérisent ce film longtemps perdu à visionner d'urgence. Depuis Shock Waves, mis à part les pitreries de Rollin et Franco, et bien... rien. Rien jusqu'à ce que Brian Yuzna s'intéresse en 2004 à un petit film hollandais : Worst Case Scenario. La bande annonce donne le ton : des Allemands bedonnants mangent des saucisses sur une plage tandis que l'on nous diffuse des images d'archives ponctuées de commentaires aussi revanchards que "ils ont envahi notre pays" ou "ils nous ont volé notre coupe du monde". Pour finir nous voyons des Morts Vivants au design cyborg, en uniforme de l'armée allemande, sortir de l'eau pour débarquer. On pourra trouver que ce film ne respire pas le bon goût, ça n'empêche pas d'être curieux de voir le résultat...

De la marche au sprint... chronique d'une mobilité évolutive

Voila un sujet soumis à bien des polémiques. Le Mort Vivant se doit-il de se traîner dans le pur style de St Romero ou au contraire de gambader comme un lapin ? Les puristes préfèrent, cela va de soi, la version lente et intellectuellement limitée du Zombie, lui donnant un côté inéluctable et dérangeant de par sa menace à priori absurde. D'autres aux contraires argumentent que si il suffit d'une bonne foulée pour distancer le macchabée, c'est à se demander comment celui-ci est entré dans l'Histoire. Ici, il ne s'agira pas de prendre partie, mais de voir plusieurs écoles, pour constater que malgré tout, la démarche du Zombie à tendance à se faire moins raide.

Aux prémices du genre - White Zombie, donc -, les Morts Vivants évoluaient avec la patte désespérément traînante. Si comme la tortue, ils sont lents mais constants, leur quotient intellectuel n'arrange rien et pour s'échapper, il suffit de se frayer un chemin. C'est encore une fois Romero qui va changer les choses. La Nuit des Morts Vivants montre toutes proportions gardées des Zombies plutôt véloces. Même si ils ne courent pas et que l'équilibre fait défaut, nous pouvons dire qu'ils vont relativement vite et que l'intelligence est assez développée, comme en témoigne l'une des première scène où une des créature attaque Barbara dans son automobile, cassant la vitre à coup de pierre. Dans Zombie-Dawn of the Dead, Romero va néanmoins adoucir le ton. Ici, les Morts Vivants sont plus lents, plus stupides, il est facile de leur échapper et leur force provient du nombre. Une orientation qui sera abandonnée dans le Jour des Morts Vivants, où cette fois, les monstres sont vicieux et rapides. Malgré tout, Romero n'osera pas leur faire davantage hâter le pas, bien que le quatrième volet Land of Dead nous réserverait parait-il quelques surprises.


En 1981, il court, il court le Zombie, et il nous vient d'Italie, avec L'Avion de l'Apocalypse. Un chemin tracé par Umberto Lenzi, suivi par Bruno Mattei. Chez ces deux réalisateurs, ils est intéressant de noter que les Mots Vivants utilisent des objets, des armes, voir même parlent. Fulci de son côté préfère la marche traditionnelle. Mais pour que le Zombie véloce reprenne du poil de la bête, il faut attendre 1984 avec le Retour des Morts Vivants. Entre franche comédie et pessimisme, Dan O'Bannon nous montre des créatures rapides, intelligentes, capables de parler et de raisonner. "Envoyez encore des médecins", articulera l'un d'eux dans une CB, satisfait du goût des hommes en blanc. Une tendance reprise dans le Retour des Morts Vivants 2, où un Zombie entame un pas de danse en imitant Michael Jackson (!) et bien sur dans le Retour des Morts Vivants 3. En Angleterre, Dany Boyle fera courir ses mutants vociférant dans 28 Jours Plus tard tandis que Zak Snyder met un coup de jeune à Romero en faisant détaler son bestiaire dans L'Armée Des Morts, remake de Dawn of the Dead. La question n'est pas de dire quelle méthode est meilleure que l'autre, disons que c'est une autre façon de faire.

Parfois, le concept va plus loin. En 1994, dans Dellamorte Dellamore, un jeune motard se fait enterrer avec sa moto... et ressuscitera évidemment au guidon de celle-ci. Dans la Tétralogie des Templiers, Ossorio fait cheminer ses Zombies à cheval (et au ralenti donc), tandis que les Nazis amphibies de Shock Waves quittent le bateau qui les abritent pour sauter, casser et nager pour le plus grand bonheur du spectateur. Toujours plus profond dans la folie, quand les Morts Vivants ne servent pas de chauffeur dans un film de Paul Naschy, nous voyons un être décharné prendre le volant d'un taxi dans Ghostbusters. Finissons avec Le Couvent, où les nonnes-zombies se déplacent... en accéléré.

Le Zombie, un art de revivre

Mais qu'est-ce qui peut bien motiver les Morts à sortir de leurs sépultures ? C'est ce que nous allons voir ici. Disons le tout net, il est n'est pas rare que la cause soit l'intervention de l'humain sur des éléments qu'il ne contrôle pas. De Frankenstein, peut être l'un des premier Mort Vivant de l'histoire, à La Nuit des Morts Vivants, tout est question de radiations, d'électricité, de chimie ou de mixtures.


De mixtures, ce sera le cas des premiers films de Zombies, qui utilise poudres et décoctions. Nous sommes donc ici en pleine coutume vaudou et lorsque dans White Zombie, Lugosi acculé jette sa fiole de produit qui éclate à terre, espérant ainsi se défaire de ses assaillants, il s'agit d'une retranscription quasi-fidèle du rite de transformation, voulant que la poudre à Zombie puisse être soufflée aux visages des victimes. D'électricité, il en sera question dans les adaptations de Frankenstein bien sûr, mais aussi dans Jason le Mort Vivant, où le croquemitaine de Crystal Lake revient à la vie après s'être pris un éclair en pleine poire. Il a bien fait, cet épisode 6 est sans doute l'un des meilleur de la série. Dans le trash Frankenhooker, l'underground Franck Henenlotter suit un jeune savant qui tue des prostituées avant d'en assembler les bouts, pensant ainsi reconstituer sa fiancée morte tout en arrangeant au passage quelques points disgracieux. Ici la science est également de mise, même si pour le coup il s'agit de faire fumer une drogue explosive (!), de mettre le tout dans un bain mystérieux et de ranimer l'ensemble après une séquence de couture. Mais la raison la plus souvent évoquée reste la négligence humaine face au nucléaire ou à des radiations quelconques, argument qui servira dans l'Avion de l'Apocalypse, dans la Nuit des Morts Vivants, dans Resident Evil ou chez Rollin pour ne citer qu'eux. Egalement très prisée, l'origine virale fait aussi figure de challenger de la cause à effet, comme en témoigne Virus Cannibale ou plus sérieusement 28 jours plus tard. Avec l'arrivé du cannibalisme, la transmission du mal prend un statut quasi-vampirique en se propageant par morsure. A côté de ces poncifs traditionnels, il convient de citer quelques exemples pas piqués des hannetons. Dans les Raisins de la Mort, Rollin met la cause dans du vin. Le Retour des Morts Vivants 5 tombe quand à lui dans l'illicite lorsque de braves gens se transforment en Zombie après avoir abusé de la drogue Z (!!). Vaguement inspiré de Lovecraft, Stuart Gordon dans Re-Animator réveille les Morts avec une seringue contenant un liquide vert fluo. Toujours plus fou, Peter Jackson dans Braindead utilise un singe-rat ainsi qu'un super fortifiant. En 1999, Dave Parker enfonce davantage le clou avec Les Morts haïssent les Vivants, fauché, mais tellement sympathique. Dans ce film jouissif donnant des hommages à tire-larigot, lesdits Morts ressuscitent grâce à une machine qui sert au passage de porte vers un univers parallèle, comme de juste bourré de Zombies. Enfin dans Plan 9 From Outer Space, les Morts se réveillent grâce à un étrange rayon, from outer space lui aussi.

Et quand les scénaristes ont l'imagination défaillante, ils ont recours à la bonne vielle malédiction. Formule maléfique dans Evil Dead ou incantations satanistes dans le Couvent, parfois la cause peut se doubler d'une envie non-satisfaite. Ainsi dans Creepshow, le jour de la fête des pères, un cadavre répugnant sort de sa tombe pour chercher un bout de gâteau. La vengeance est également une bonne motivation. C'est bien connu que c'est un plat qui se mange froid : Creepshow toujours nous montre deux noyés revenus rendre des comptes tandis que l'Etrange Cas de Mr Waldemar, premier sketch de Deux Yeux Maléfiques, s'intéresse à un Mort moins mort qu'il en a l'air. Pour finir sur une touche poétique, dans Dellamorte Dellamore, les morts reviennent à la vie sans que l'on sache trop pourquoi. Voila qui a le mérite de la simplicité...

Comment tuer un Zombie ?

Ah c'est malin, vous avez ouvert une porte maléfique et vous voici entouré(e) de Zombies grimaçants. Heureusement, Krinein est là pour vous tirer de ce mauvais pas !


Si dans White Zombie, les morts vivants résistent déjà aux balles, ils sont en revanche d'une stupidité à toute épreuve. Pour en venir à bout, il suffit de les faire marcher sur la bonne trajectoire et d'attendre qu'ils tombent de la falaise. Le Mort Vivant devenu une vraie menace, Romero apportera un peu de piquant : tout est possible, tant que la tête est touchée ou séparée du corps. Balles bien sur, mais aussi machette, tournevis, tartes à la crême et autres pied de biche servent ainsi d'arsenal aux personnages de la trilogie. Dans les Evil Dead, Sam Raimi préfèrera la tronçonneuse. De son côté, Dave Parker, indécis, utilisera la méthode Romero et la méthode Raimi, tout en allumant un beau feu de joie. Si dans votre malheur, vous tombez sur le vicieux Dan O'Bannon, il vaudra mieux courir vite : le réalisateur ne voit pas l'intérêt de tuer ce qui est déjà mort. Les Zombies du Retour des Morts Vivants, de la décapitation à la bombe atomique, sont indestructibles, même réduits en cendres. Tout comme le Stuart Gordon de Re-Animator, qui décapite et démembre ses créatures sans qu'elles en soient impressionnées. Comme pour leur donner la vie, un coup de seringue-mystère les ramènera au trépas. Dans Plan 9 From Outer Space, Ed Wood joue la complication : ses Morts Vivants sont indestructibles, mais s'arrêtent d'eux-même une fois le rayon mystérieux coupé. Dans Shock Waves, les Nazis sont invulnérables, sauf lorsqu'on enlève leurs seyantes lunettes. Plus bourrins, Mike Mendez et Adrienne Barbeau règlent le problème à coup de Shotgun et d'AK 47 dans le Couvent, les mafieux couplent le Kung Fu et les flingues dans Versus, pendant que dans Braindead, Lionel joue de la tondeuse à gazon et tranche tous azimuts. Tommy Jarvis quand à lui est un peu embêté : il a beau y mettre de la bonne volonté, impossible de renvoyer Jason ad patres. Faute de mieux, il va le couler dans Crystal Lake, mais comme nous sommes au sixième Vendredi 13, il reste encore quatre épisodes à assurer en plus d'un versus, ce n'est donc que partie remise pour le tueur au masque de hockey.

Et si tout ceci ne mène à rien, essayez des méthodes plus pacifiques. Se déguiser en macchabée par exemple, voila qui a fait ses preuves dans Les Morts Haïssent les Vivants. De plus, les Zombies aiment bien qu'on discute avec eux, regardez Bub dans le Jour des Morts Vivants. Une façon comme une autre de rompre la monotonie du trépas, comme le dit si bien le fantôme du Loup Garou de Londres : "tu as déjà discuté avec un Mort ? C'est barbant"....

Guide de survie

Et pour finir ce dossier, si par un quelconque hasard vous vous retrouvez enfermé(e) dans un film de Zombies, voila pour finir quelques points à respecter. Peut être vous en sortirez vous vivant(e)s...

  • Si vous êtes une jeune femme, n'allez pas au lac vous baigner dans le plus simple appareil.
  • Un vieux livre ne doit pas être ouvert.
  • Un vieux magnétophone ne doit pas être utilisé.
  • N'enterrez rien dans un cimetière indien.
  • Si vous tournez un film, il est déconseillé de se servir d'un cercueil trouvé à la cave comme élément de décor.
  • Même si c'est joli.
  • Si vous trouvez des vieux conteneurs de l'armée américaine, ne tapez pas dessus pour montrer que c'est solide : ce n'est pas solide.
  • D'une manière générale, évitez tout ce qui touche au nucléaire ou à des radiations quelconques.
  • Si un vieil homme à l'accent allemand vous dit de quitter son île, écoutez-le.
  • Si vous voyez vos copains/copines exploser après avoir fumé un gros pétard, c'est qu'il y a quelque chose de suspect...
  • Ne faites pas de strip-tease dans un cimetière.
  • Si vous vous promenez en calèche à Haïti, arrangez vous pour que Bela Lugosi ne vous pique pas votre écharpe.
  • Le camp des cannibales n'est pas forcément une bonne planque.
  • Si vous êtes poursuivi par un Zombie, à tout hasard demandez lui ce qu'il veut. Sait on jamais, peut être désire-t-il seulement un bout de gâteau.
  • Si vous ne parvenez pas à le semer, essayez toujours de lui faire danser le Moon Walk.
  • Visez la tête. Inutile de vider vos chargeurs dans l'abdomen des Morts.
  • Ne vous promenez jamais seul(e)s dans le désert. Même s'il y a un trésor enfoui.
  • Ne recueillez pas d'animaux-zombies. Sauf si ce sont les chevaux de Templiers fantômes.
  • Les Mortes Vivantes n'ont pas forcément meilleur caractère que leurs homologues masculins.
  • Garder des Zombies dans sa cave est une mauvaise idée.
  • Les nourrir est encore pire.
  • Les bébés Zombies ne sont pas mignons.
  • Les enfants Zombies sont des teignes.
  • Quoi qu'il arrive, n'appelez jamais l'Armée à la rescousse.


CERVEAUUU ! CERVEAUUUUU ! - Return of Living Dead