8.5/10Batman - 1989

/ Critique - écrit par Kassad, le 09/02/2004
Notre verdict : 8.5/10 - Noir comme la nuit (Fiche technique)

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Noir comme la nuit

Pendant longtemps j'ai cru que les comics étaient destinés aux enfants voire aux adolescents attardés. Pourtant en m'y intéressant de plus près, j'ai peu à peu découvert que ce monde était au moins aussi riche et complexe que celui de la littérature dite "sérieuse". Pour peu qu'on veuille bien se donner la peine, on y trouve de tout. Les super-héros ne sont pas tous comme Superman : dotés de super-pouvoirs, de supers vêtements (encore que dans le cas de Superman justement...), de supers principes moraux et autres supers attributs (pas d'esprit mal placé s'il vous plaît). Bref, ils ne sont pas tous ni supers lisses, ni supers chiants. Personnellement je trouve que Batman et Daredevil sont les super-héros les plus intéressants et les plus complexes de ce monde. Batman, puisque c'est de lui dont il s'agit, n'est pas vraiment du genre sympa. D'abord il s'habille en noir (il sort la nuit comme les chauves-souris), et de plus il n'est pas du genre boute-en-train, ne vous attendez pas à le voir sourire ou exprimer sa joie. Et c'est là le premier renversement qu'opère Batman : le Joker, son ennemi/ami intime, est quant à lui affublé d'une grimace inaltérable et s'habille en couleurs vives (violet : ça va bien avec ses cheveux verts). Le gentil fait la gueule alors que le méchant fait de l'humour. Il y a bien cette antinomie totale entre les deux, typique du comics (l'ennemi de Daredevil qui est aveugle est un tireur d'élite doté d'une vision hors
pair par exemple), mais elle est brouillée, les cartes sont distribuées autrement que dans les comics "normaux". Il y a plusieurs visions de ce personnage, par exemple celle de Moore dans Rire et mourir, mais c'est sans doute du côté de Frank Miller et de son Dark Night, ou encore de Morisson et McKean dans Arkham Asylum, que Burton est allé chercher son inspiration.

Gotham City est une citée sombre rongée par le crime et la corruption. Le maire promet que tout rentrera dans l'ordre... Les promesses n'engagent que ceux à qui on les fait n'est-ce pas ? Mais voilà un justicier qui vient faire le ménage et terroriser les délinquants, il porte un costume de chauve-souris et semble immortel. Pendant qu'il débarrasse la rue de la petite délinquance, dans les hautes sphères du pouvoir les requins se déchirent entre eux. Le parrain, Grissom, décide de se séparer de son fidèle lieutenant Jack Napier en lui tendant un piège dans une usine chimique. Au cours du combat qui s'ensuit Batman fait tomber Napier dans une cuve d'acide, il en ressort défiguré à vie sous l'identité du Joker.

Burton nous montre un Batman sur la tangente, sa santé mentale est fragile. Il est traumatisé par la mort de ses parents, il est violent, voir sa première altercation avec des malfrats où il en menace un de mort pour répandre la peur dans le coeur des autres délinquants, et par moment sa presque schizophrénie apparaît. Son alter ego, le Joker, est quant à lui exubérant et vraiment en décalage par rapport aux méchants "normaux". Son traitement du crime est teinté de préoccupations esthétiques : les mimes devant le palais de justice ou encore la "mise à jour" des oeuvres d'arts le tout en dansant sur du Prince est un grand moment, en sont quelques exemples. En fait c'est plus la folie, au sens plein du terme, que la méchanceté qui le caractérise, ce qui fait qu'on a tendance à le considérer plus comme malade que comme mauvais. C'est aussi ce qui le rapproche de Batman, lui aussi malade mais avec des symptômes différents.

Nous autres Français avons un handicap à surmonter pour apprécier ce film. Il faut savoir que Keaton qui joue Batman ressemble comme un jumeau à Julien Lepers, et ça rend sa crédibilité pour tout dire moyenne. C'est injuste car Keaton joue très bien (comparé à Clooney et Kilmer qui font des Batman plus "glamour"), mais c'est quand même Nicholson qui enfonce tout dans ce film. Son interprétation (comme toujours quand il s'agit de malades mentaux que ce soit dans Vol au dessus d'un nid de coucou ou Shining) du Joker y est grandissime. A voir absolument car il s'agit, en ce qui me concerne (avec Batman le défi) de la meilleure adaptation d'un comics à l'écran...