Les randonneurs à Saint-Tropez
Cinéma / Critique - écrit par riffhifi, le 11/04/2008 (Une suite tardive à peine à la hauteur de l'original, dans laquelle seul Benoît Poelvoorde tire vraiment son épingle du jeu. Pas même assez nunuche pour rivaliser avec les autres titres contenant l'appellation « Saint-Tropez ».
Le plus gros succès de Philippe Harel à ce jour s'appelait Les randonneurs. Pas un carton historique pour autant, on pouvait donc supposer une certaine sincérité dans cette suite débarquant du néant onze ans plus tard. On pouvait aussi soupçonner un opportunisme lié à la mode des suites tardives, à Hollywood (Rambo, Indiana Jones) comme en France (les Bronzés, Trois hommes et un couffin), couplé à un usage fumeux de l'appellation « Saint-Tropez » liée à une galaxie de comédies populaires souvent douteuses. Juste pour rire, passons-les en revue : Le gendarme de Saint-Tropez, bien sûr (suivi de ses prolongations de plus en plus nazes), mais aussi Le facteur de Saint-Tropez (avec Paul Préboist) et la trilogie de Max pécas Les branchés à Saint-Tropez, Deux enfoirés à Saint-Tropez et On se calme et on boit frais à Saint-Tropez. Certains archéologues avancent même qu'il y aurait eu en 1968 un téléfilm appelé Saint-Tropez priez pour eux, avec Pierre Perret, Guy Marchand et Serge Gainsbourg.
Pourtant, ce n'est pas à Saint-Tropez que vont Nadine (Géraldine Pailhas), Cora (Karin Viard), Louis (Philippe Harel) et Matthieu (Vincent Elbaz), mais à Ste-Maxime, où ils espèrent bien passer des vacances reposantes et bon marché.
Une frange de la population mange des yaourtsMais Matthieu décide d'aller faire le kéké à Saint-Tropez, où il croise Eric (Benoît Poelvoorde), devenu un Tropéziste (ah bon, on ne dit pas comme ça ?) vautré dans le luxe, la magouille et la débauche. Pour une raison un peu floue (plus ou moins l'envie de frimer), Eric fera découvrir le monde de Saint-Trop' à sa « bande de cons ».
En onze ans, trois des cinq personnages n'ont pas évolué d'un iota : Harel et Elbaz refont leur numéro de Grincheux et Joyeux, tandis que Pailhas joue toujours la célibataire pétillante amatrice d'hommes mariés. En revanche, le personnage de Karin Viard est désormais marié à un certain Jean-Jacques, et se découvre sur le tard un pouvoir sexuel insoupçonné, tandis que celui de Poelvoorde est désormais un flambeur impénitent, superficiel et prétentieux, une alternative de ce que le personnage de Popeye des Bronzés aurait pu devenir. Le petit groupe, en fin de compte, ne randonne pas un seul instant, il se la coule douce, se calme et boit frais. Voilà, à Saint-Tropez donc. Impossible de résumer l'histoire, elle n'existe pas plus que dans le premier film (plutôt moins d'ailleurs), à l'exception de la quête d'épanouissement sexuel de Karin Viard et des rapports occasionnellement "Louis De Funès" de Poelvoorde avec son domestique espagnol. Les gags s'enchaînent avec une relative mollesse, car c'est encore une fois l'étude de caractère qui est
Saint-Clopezprivilégiée à l'humour force 10. Pas de bol, on connaît déjà les caractères en question, et l'absence complète de parti-pris sur les situations rencontrées donne au film une image lisse, fade et presque ennuyeuse. Est-on supposé s'émerveiller devant le luxe et les paillettes de Saint-Trop' ? S'indigner devant la décadence de ce monde ? Les personnages vont-ils vivre autre chose qu'un dépouillage en règle de leur porte-monnaie ? Au bout du compte, et dans un final honteusement expédié, façon « le métrage est suffisant, envoyez le générique », on réalise que Poelvoorde est quasiment le seul à avoir secoué nos zygomatiques, et que la fine équipe ferait mieux de se disperser pour se consacrer à de nouveaux projets.
On aurait peut-être été plus indulgent si le même film était sorti deux ans après le premier. Onze ans après, on peut s'indigner de l'immuabilité coupable des personnages. C'est un reproche qu'on ne pouvait pas faire aux Bronzés 3, mine de rien.