Les promesses de l'ombre
Cinéma / Critique - écrit par riffhifi, le 17/11/2007 (Cronenberg retrouve Viggo Mortensen pour un nouveau thriller sombre et efficace. Le réalisateur semble avoir délaissé ses obsessions organiques pour le polar vaguement prétentieux.
Deux ans après A History of Violence, Cronenberg retrouve Viggo Mortensen pour un nouveau thriller sombre et efficace. Le réalisateur canadien semble avoir délaissé le fantastique à base d'obsessions organiques pour le polar de base enrobé de prétentions un peu artificielles...
Anna (Naomi Watts) est sage-femme. Lorsqu'elle voit mourir une jeune fille de 14 ans qui vient d'accoucher en catastrophe, Anna cherche à retrouver la famille de la morte pour leur confier le bébé. Mais la jeune fille était russe, et ne laisse derrière elle qu'un journal intime, qui mène à une autre famille : une branche de la mafia russe exilée à Londres, dirigée par Semion (Armin Mueller-Stahl) et son fils Kirill (Vincent Cassel). Et Viggo dans tout ça ? Il joue Nikolai, le chauffeur de Kirill et son homme de main. Un homme de main qui fait preuve d'un caractère et d'une intelligence bien supérieurs à ceux de son maître.
"Vincent, tu me prends la tête"Si on peut s'interroger d'emblée sur la pertinence de prendre un Français, un Allemand et un Américain pour jouer trois Russes, force est d'admettre que le résultat à l'écran n'a rien de choquant, à moins peut-être de parler russe soi-même. Si Vincent Cassel écope d'un rôle de faible qui incite à l'oublier assez vite, on retiendra néanmoins les prestations tout en subtilité en tensions contenues de Viggo Mortensen et Armin Mueller-Stahl. Les deux hommes, toujours sur la corde raide, trouvent l'équilibre adéquat entre la bonhomie, la force tranquille et la dangerosité. Face à eux et à leur rôle, celui de Naomi Watts ne fait pas vraiment le poids, et son personnage passe dans le film comme un pet sur une toile cirée, ce qui pourrait passer pour une sacrée maladresse si on considère que l'histoire s'ouvre sur elle. En fin de compte, l'intérêt se porte bien vite sur le fonctionnement interne des « vori v'zakone » (« voleurs dans la loi ») : leur code de l'honneur, leur façon de faire disparaître les cadavres, leur plats favoris et les chansons qu'ils aiment entonner. Une sorte de version russe du Parrain.
L'intrigue avec le bébé étant rapidement identifiée comme un simple catalyseur, les relations entre les personnages gagnent en intérêt à mesure que le film avance, jusqu'à une scène d'action d'une brutalité impressionnante à mettre au crédit d'un Viggo Mortensen courageux (qui dérouille certes moins que son personnages, mais bon...). Mais au bout du compte, ce n'est jamais qu'un polar de plus, réalisé par un homme qui a tiré les conclusions de ses films précédents : eXistenZ fut un gros bide et A History of Violence un succès public et critique. Alors pourquoi prendre le risque de retourner à des productions personnelles dérangeantes, quand un petit thriller avec Viggo Mortensen est tout ce que le public demande ?..