Igor
Cinéma / Critique - écrit par Luz et riffhifi, le 22/12/2008 (Tags : igor produit prenom disponibles prince avis prenoms
« Tout ce que j'ai avec moi, c'est une marionnette dont les yeux se croisent les bras appelée Iiiiigor ! » Grand-père Fred dans Gremlins 2
Dans l'imagerie traditionnelle du cinéma d'épouvante gothique, Igor est le serviteur bossu et à moitié demeuré du savant fou qui officie dans son château en ruine...
Bela Lugosi / Marty FeldmanPourtant, dans le Frankenstein de 1931, le personnage ne s'appelle pas Igor mais Fritz (joué par Dwight Frye), et dans La fiancée de Frankenstein en 1935, le même Dwight Frye joue un valet appelé Karl. Il faut attendre Le fils de Frankenstein en 1939 pour apercevoir un Ygor (oui, avec un Y !) machiavélique et mutilé incarné par Bela Lugosi. Depuis, le prénom reste associé à ce type de personnage, qu'on retrouve aussi bien dans le Frankenstein Junior de Mel Brooks (interprété par Marty Feldman) que dans le récent Van Helsing où Hugh Jackman se coltine tout le bestiaire fantastique traditionnel.
Dès les premières scènes dévoilant la vie terriblement ingrate des serviteurs-nés à l'appellation officielle d' « Igor » (bossus, bêtes et zozotants), voire de « Baisse la manette, Igor ! », le film d'animation (en images de synthèse, tant pis) prend des allures sombres aussi bien dans le scénario que dans les personnages. Un monde cruel s'ouvre à nous, dont les habitants prisonniers de nuages les coupant de toute lumière et par conséquent de toutes cultures agricoles, ne survivent que grâce aux créations abominables de leurs savants fous, demandant ensuite à l'extérieur de payer des sommes pharamineuses afin d'éviter leur utilisation. Sous l'influence de leur roi Malbert, le peuple de Malaria s'enterre sous les mauvaises
Igor et ses bouletsactions et l'ignominie influençant la moindre des générations à venir. Même les plus innocents tentent de se plier à ce règne de méchanceté. C'est là qu'interviennent Igor et ses créations : Brain le cerveau lent et Rapidos le lapin immortel pressé de mourir...
Malgré ses composantes clairement ancrées dans le patrimoine américain (l'Igor lui-même, l'approche "hollywoodienne" du récit, le répertoire musical...), il s'agit ici d'une création sortie de studios d'animation français, ce qui explique peut-être que vous n'en trouviez la version "originale" que difficilement en salles... dommage, car le doublage américain compte des voix aussi prestigieuses que John Cusack, Steve Buscemi, John Cleese ou encore Christian Slater, là où le Frenchie doit se contenter de noms inconnus mais de voix reconnaissables, puisqu'il s'agit d'acteurs spécialisés dans le doublage : le rôle-titre est ainsi vocalisé par William Coryn, à qui l'on doit notamment les voix de Mark Greene dans Urgences et Sean McNamara dans Nip/Tuck. Ce n'est pas forcément plus mal, mais on aurait aimé avoir le choix par une diffusion v.o. plus massive.
Le film réussit à toucher ses deux publics sur deux niveaux différents : là où les
Igor et sa pouletteenfants trouveront une quête initiatique saupoudrée de personnages cocasses, les adultes se délecteront de l'ironie et des multiples références cinéphiliques (une caricature de Marlene Dietrich, un hommage à Orange mécanique...), ainsi que de la variation bon enfant proposée sur le thème de Frankenstein. Non pas que l'idée d'une créature féminine soit totalement inédite (La fiancée de Frankenstein dès 1935, mais aussi Frankenstein's daughter en 1958, Frankenstein créa la femme en 1967...), ni que l'aspect visuel du film soit totalement satisfaisant (outre son côté un peu rapido, on peut lui reprocher un air de famille avec les animations de Tim Burton - le roi Malbert est un frère jumeau du maire de L'étrange Noël de M. Jack), mais le rythme effréné et les gags incessants parviennent à faire d'Igor un divertissement plutôt réussi.