Dossier spécial - Les glandeurs au cinéma

/ Dossier - écrit par Hugo Ruher, le 17/07/2012

Tags : cinema film dossier ago films view smith

Salut à toi Krinaute,

Aujourd'hui, à l'occasion de la sortie des Kaïra, un film sur une bande de ratés des cités, nous allons revenir sur les héros du quotidien, ces types qui nous ressemblent, à la différence près qu'ils sont dans des films, ces types qu'on admire et à qui il est souvent bien trop facile de s'identifier : les glandeurs. Et autant vous dire qu'il y en des glandeurs au cinéma, tout le monde n'est pas Batman ou Chuck Norris, on trouve aussi des loosers, des mous du slip, des branleurs, des faignants... bref, des gens qui nous ressemblent. Et ce dossier écrit après le deuxième pack de Kro n'est qu'une modeste pierre de lassitude dans le monument de je-m'en-foutisme qui devrait leur être consacré. C'est le dossier cinéma spécial glandeur.

 


Alors, il me faut du lait... et quoi déjà?
Hey Dude...

Si les glandeurs avaient un Dieu, ce serait lui donc avant de te faire subir toutes les pensées du style : « Il va sûrement parler de lui », « S'il oublie j'envoie un colis piégé » etc... voici le Dude de The Big Lebowski. Ce type est juste la représentation incarnée du nihilisme et du glandage sur canapé, avec si possible un joli tapis sous les pieds mais c'est une autre histoire... Affichant toujours un regard vide, que ce soit devant une cuvette de chiotte, une femme nue ou une vodka-lait, le Dude n'entreprend jamais rien sans y être irrémédiablement forcé. D'un autre côté, se foutre de tout à ce point ce doit être fatiguant à force donc le Dude mérite tout notre respect pour avoir élevé le glandage au rang d'art à part entière. Ce héros qui s'ignore aura inspiré toute une génération de glandeurs qui aujourd'hui, le regardent et à l'occasion, se déplacent lentement jusqu'à l'épicerie la plus proche pour acheter du lait et une bouteille de vodka à 6 euros pour lui rendre hommage. Tu es grand Dude, très grand.

 


Il est beau gosse Ken, tu me prêtes ta chaussette?
Glandons, poil au menton.

Il n'est pas nécessaire d'être un barbu bedonnant comme ce bon vieux Dude pour être un vrai glandeur. Et ça, les personnages effrayants de réalisme dans Les Beaux Gosses l'ont bien compris. Hervé, un jeune collégien pas aidé par un gros pif, une coupe de cheveux indéfinissable et un tempérament de looser passe ses journées dans un vide nébuleux d'inactivité. Durant le film, on ressent fortement l'aspect glandeur en suivant Hervé qui navigue lentement du collège à sa chambre, Hervé qui drague une fille comme un gros relou (enfin, comme un type de 14 ans), Hervé qui engueule sa mère, Hervé qui entretient une relation charnelle avec sa chaussette etc... (pour ce dernier exemple, regarde le film je préfère ne pas détailler). Et là encore une fois, il est plutôt facile de s'identifier à ce genre de personnage tellement raté qu'il en deviendrait plus attachant que tous les Schwarzy.

 


Et après je l'ai -bip- au -bip- par le -bip-....
Rejoins le côté obscur de la glande.

Si Les Beaux Gosses met en avant le côté comique de la glande, Larry Clark nous entraîne dans une vision tout à fait différente dans Kids. Ici pas de blague sur les ados accros au Biactol ou de soirées lycéennes à bord de yacht. On suit cette fois Telly, qui glande dans les rues de New-York. Mais Telly est un glandeur bien particulier qui trouve quelques occupations allant du vol au passage à tabac, en passant par le sexe, la drogue et l'alcool. Le tout avec des dialogues extrêmement crus et violents. Le film est d'autant plus dérangeant que les protagonistes n'ont pas plus de 15 ans et Larry Clark ne fait pas dans la demi-mesure, il ne cherche pas à donner une image positive de la jeunesse actuelle, ce qui fait tout de même un peu peur. C'est là qu'on se dit que quitte à être un branleur, autant faire ça bien et se contenter de vodka-lait comme le Dude, c'est beaucoup plus sain...

 


Ashton ne savait pas qu'il était filmé.
Ashton est dans son élément.

Il y a certains acteurs qu'on ne peut pas encadrer pour une raison ou une autre. En ce qui me concerne, ma bête noire c'est Ashton Kutcher dont le jeu d'acteur me donne envie de me passer la tête 30 minutes au micro-onde. Pour essayer de justifier ma répulsion, je dirai que je le trouve stupide mais dans Eh mec ! elle est où ma caisse ? Et bien Ashton est tout simplement génial, il arrive à concentrer tout ce qu'on déteste dans son jeu d'acteur mais en le prenant au second degré et en le transformant en humour débile irrésistible. Dans cette quête pour retrouver une voiture après une soirée trop arrosée, il est accompagné de Seann William Scott plus connu sous le nom de « Stifler de American Pie ». Et ce film est le bon exemple de ce qui peut pousser un glandeur à agir : ici une voiture... enfin les cadeaux qu'il y a dedans... non en fait s'ils ramènent pas ces cadeaux ils seront privés de sexe par leurs petites amies. Il y a aussi une histoire de secte mais en réalité on s'en fiche un peu et tout ce qui compte c'est ce duo de ratés perdu dans des aventures qui les dépassent.

 


L'un des deux a bossé un temps à la Maison Blanche.
Un burger pour les dominer tous.

Dans le même style que le précédent, voici Harold et Kumar chassent le burger. Si tu ne connais pas ce film cher Krinaute, tu te doutes déjà au vu du titre qu'on ne va pas aller dans du Godard. L'histoire est celle de deux … (place le synonyme de « glandeur » de ton choix) qui traversent les États-Unis à la recherche de burgers apparemment délicieux. Et voilà. C'est tout ? Et bien oui c'est tout et on n'en demande pas plus. Les deux types en question sont Sulu dans le nouveau Star Trek et l'indien de Dr. House. Et oui pour me mettre dans l'ambiance glandeur je n'ouvre même plus Wikipédia pour trouver le nom des acteurs. Et donc pour en revenir au film, les deux compères se lancent dans des aventures de plus en plus déjantées pour avoir leur fameux burger. Et si tu trouves que c'est un peu limite comme scénario pour un film entier, dis-toi qu'en fait il y a eu une suite qui se déroule à Guantanamo. Non il n'y a pas de réelle évolution dans celui-ci si ce n'est qu'il est peut-être encore plus drôle ! Et pour finir je ne poserais qu'une question : que ferais-tu jeune Krinaute mâle, si tu avais à ta disposition une femme entièrement constituée de marijuana ? Tu ne sais pas ? Et bien c'est pour ça que tu n'es pas le personnage principal d'un film de glandeur.

 


La même chose pour moi.
Glander de l'Espagne au Yang-Tsé-Kiang .

Pour finir, on va changer un peu de registre avec une incartade dans le grand cinéma français des années 1960. Dans Un singe en hiver d'Henri Verneuil, on suit les errances d'un jeune chien fou, Jean-Paul Belmondo, qui se noue une solide amitié avec un ancien alcoolique repenti, Jean Gabin. Ces deux monstres sacrés du cinéma, et dans ce cas précis, de la glande, ne vivent que pour le voyage. Mais pas le voyage qui se fait avec le sac à dos et les chaussures de rando, plutôt celui qui se dessine au cul des bouteilles et qui permet de faire de la barque sur le Yang-Tsé-Kiang ou de jouer les toreros au fin fond de l'Andalousie. Un superbe film qui permet de faire ressortir tout le côté grandiose et poétique du glandage, à voir pour les délires extrêmement communicatifs de Bebel et Gabin, et aussi pour une fin en apothéose qui sublime le je-m'en-foutisme d'une manière magistrale.

 

Et voilà Krinaute, c'était le dossier spécial glandeurs, j'espère que tu as pu en profiter pour te détendre et ne rien faire. D'ailleurs nous allons finir sur une citation de M. Coluche : « Faignant c'est pas beau mais qu'est-ce que ça repose ».