Les Berkman se séparent
Cinéma / Critique - écrit par Vincent.L, le 13/07/2006 (
Les Berkman se séparent surprend et séduit par sa facilité à refléter une réalité sociologique complexe. Parler de divorce au cinéma n'est pas une tâche facile. Réussir à rendre l'essai intéressant l'est encore moins. Avec son quatrième film, le réalisateur américain Noah Baumbach parvient brillamment à en exposer les difficultés et les conséquences sur les enfants.
Entre ses brefs élans comiques ultra cyniques, de belles scènes du quotidien et des aspects dramatiques joués avec extrême justesse, le long métrage offre un cocktail irrésistible. Le spectateur est plongé dans cette histoire de divorce où l'addition des caractères de chacun explique la pénible situation familiale. En tête, l'égocentrisme, la prétention et la radinerie du père sont traduites par un Jeff Daniels (Pleasantville) d'une déchirante sincérité. Les côtés borné, égoïste et fier de son personnage renvoient à des défauts fréquents chez les hommes. En face, la tendresse d'une mère maladroite est magnifiquement incarnée par Laura Linney (Dr. Kinsey), décidemment irréprochable et très charmante. Avec le temps, la lassitude et les changements de caractères affaiblissent le couple jusqu'à le tuer. La question des enfants est alors particulièrement complexe.
Le point fort de ce film est de parvenir à lier à la perfection l'histoire de la séparation des adultes et ses effets sur les enfants. Pendant que les parents se cherchent de nouveaux équilibres financiers et conjugaux, les adolescents découvrent l'adolescence et le sexe. Le réalisateur ne baisse jamais de rythme et les 80 minutes passent en un éclair. Jesse Eisenberg, vu dans Le Village, dégage un charisme étonnant. Il représente un fils qui cherche à forger sa personnalité malgré le modèle étouffant de son père. Grâce à ce personnage, le film trouve un bel équilibre et affiche un tendre espoir. En repartant dans ses souvenirs d'enfance, l'adolescent retrouve le bonheur d'une relation parentale simple et heureuse. Si l'on rajoute à cela une musique composée de titres de Bryan Adams, Lou Reed, Tangerine Dream ou encore Pink Floyd, il n'y a plus grand-chose à demander.
En mélangeant l'humour souvent cassant de la vie et les contrariétés des relations familiales après un divorce, Les Berkman se séparent se classe sans prétention parmi les meilleurs films de l'année. On regrettera la traduction plus qu'étrange du titre original, « The Squid and the Whale », qui signifie « la pieuvre et la baleine ». Une part de la poésie du film est ainsi malheureusement perdue.