V pour Vendetta
Cinéma / Critique - écrit par Nicolas, le 20/04/2006 (Tags : pour film vendetta evey masque moore david
Autant en emporte la Vendetta
Au XXIème siècle, Londres est un pays soumis aux lois délirantes du chancelier Sutler, terrorisant la population et assommant les idées nouvelles à coups de propagande. Sur le point d'être violée en pleine rue par des agents des forces de l'ordre, Evey (Natalie Portman) est sauvée par un étrange individu masqué se faisant appeler V (Hugo Weaving). D'abord reconnaissante, elle se rendra vite compte que son bienfaiteur n'est autre qu'un terroriste ourdissant une sourde vengeance à l'échelle nationale...
Nous pourrions allègrement disserter sur la nécessité de transposer au cinéma une oeuvre majeure de la bande dessinée des années 80, des éléments qui en auraient fait une bonne adaptation, ou encore de ce qui se serait produit si les versions du scénario avaient été inversées (celle du film en BD, et vice-versa) ; mais nul doute que nous ne serions parvenus à rien de bien concret, le problème étant toujours du même tonneau. Car oui, V pour Vendetta ciné effectue de très nombreux détours par rapport à son homologue dessiné, et proportionnelle en sera la hargne farouche des fans regardant d'un mauvais oeil la production depuis que celle-ci fut annoncée (la transformation infligée à Evey et le grand final ont de quoi interpeller). Pourtant, la ligne conductrice demeure similaire : une Angleterre menée à la baguette à travers le contrôle de l'information, la propagande sauvage, et l'extermination des supposés rebus (tout amalgame avec quelque régime dictatorial que ce soit serait évidemment purement judicieux), qu'un extrémiste va dynamiter sous la couverture d'un masque de théâtre. Un génie, un homme presque sur-humain, un être paradoxalement froid et sensible ; mais également un terroriste, dont le dessein à court terme est avant tout de répandre une idée, un symbole. Certes, la cause semble juste, mais justifie-t-elle la méthode ? Animé d'un désir de vengeance, il distribue les roses tel un bachelor, non pas pour déterminer qui reste, mais plutôt pour signer un assassinat sanglant. Cette dualité, ce refus du manichéisme engendre une certaine fascination pour le film, un réel désir d'en voir le bout et d'en apprécier le dénouement, qu'il soit conforme ou non à la vision de base de Moore (rappelons qu'il a renié le film). Après, chacun pourra faire son opinion et y voir de subtiles références au monde contemporain, même si le film ne fait pas dans la dénonciation pure et dure et garde des valeurs de divertissement.
La bande-annonce, les affiches, et la communication dans sa globalité induisaient le spectateur profane dans l'erreur : V pour Vendetta n'est pas un film d'action. Il n'en a d'ailleurs pas les moyens. Un comble pour un film soutenu par Joel Silver et les frères Wachowski. La réalisation échoit d'ailleurs à l'un de leurs assistants réalisateurs, qui signe une première oeuvre relativement simpliste et sans grande audace. Hugo Weaving, cantonné derrière le masque (qu'il n'ôtera bien sûr jamais), livre une interprétation très théâtrale du personnage, et plutôt convaincante dans les phases dialoguées qui semblent loin d'être simples. A la riposte, Natalie Portman offre le bundle classique de son talent, à savoir sourires, pleurs, et hurlements.
Une transposition qui ne manquera pas de faire du bruit chez les adeptes du roman graphique et chez les personnes qui pensaient avoir à faire à un film d'action conventionnel (cause bande-annonce). L'intérêt croît tout au long des deux heures, malgré une réalisation somme toute très banale et un évident manque de moyens ; mais la riche thématique du film se suffit à elle-même.
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