No country for old men - Non, ce pays n'est pas pour le vieil homme
Cinéma / Critique - écrit par riffhifi, le 25/01/2008 (Tags : pour film coen homme chigurh anton moss
Les frères Coen restent fidèles à leur univers mais s’essaient parallèlement au mystère nébuleux à la David Lynch.
Les frères Coen, qu'on les aime ou non, sont rarement là où on les attend. Naviguant allègrement entre la comédie au ton personnel mais aux ficelles parfois lourdingues, et le polar à la violence crue peuplé de personnages atypiques, Joel et Ethan ont bâti depuis une vingtaine d'années une filmographie digne d'intérêt et source de surprises. Leur dernier opus, s'il ne trahit pas leur goût pour les texans rudes et l'humour décalé, flirte de façon plutôt bizarre avec l'ésotérisme le plus complet.
1980, Texas. Anton Chigurh (Javier Bardem) est un homme au visage fermé qui porte des vêtements disco et une coupe de cheveux illégale dans 47 états. Il porte également une bouteille d'air comprimé avec laquelle il dessoude sans hésitation la majeure partie des gens qu'il rencontre.
De son côté, Llewelyn Moss (Josh Brolin) chasse le cerf sans succès, lorsqu'il tombe sur les lieux d'un règlement de comptes entre vendeurs de drogues. Il tombe également sur une mallette qui contient deux millions de dollars, dont il se saisit sans se douter qu'elle va lui attirer l'inimitié du monsieur cité dans le paragraphe précédent.
De prime abord, le film se présente comme une sorte de western moderne : le shérif des années 80 est un alter ego sensiblement identique à son ancêtre armé
Non, ce pays n'est pas pour l'homme secde colts, le décor sablonneux rougit vite du sang des cow-boys qui le foulent, et les deux protagonistes principaux s'engagent dans un duel à mort qui mettra à contribution toute leur virilité. Si Josh Brolin campe un Texan emblématique, mâchouilleur de mots encadré d'un large chapeau et de santiags, l'Espagnol Javier Bardem se distingue dans un rôle de psychopathe tranquille à l'origine indistincte, véritable attraction du film par son modus operandi pour le moins original (tuer à coups d'air comprimé, il fallait y penser) et son sens de la conversation incontestablement déroutant. Sorti de ces deux zouaves et de leur confrontation épique, les autres personnages apparaissent terriblement secondaires, bien que Woody Harrelson et Tommy Lee Jones fassent leur possible pour imposer leur présence dans l'histoire.
Mais si les frères Coen tiennent bon la rampe de leur récit serré et admirablement mis en scène (les frangins ont toujours un sens du cadrage très sûr, et savent ici
Non, ce pays n'est pas pour le coiffeurutiliser le silence à merveille là où ce genre de film se complaît trop souvent dans la saturation sonore), ils semblent vouloir, en bout de parcours, conférer à l'ensemble une part de mystère « à la David Lynch ». La narration se trouve soudain parsemée d'ellipses étonnantes, avant de s'achever de façon ouverte à l'aide de deux scènes qu'on voudrait voir suivies d'un développement qui jamais n'arrivera. Rapprochée de la voix off d'introduction, cette fin doit pouvoir livrer au spectateur désireux de creuser le sujet une réelle matière à réflexion. Mais en toute honnêteté, on peut s'interroger sur la nécessité de clore un tel film de manière aussi excessivement sibylline. Toutes les propositions d'interprétation sont bienvenues. Sous la couche protectrice de la balise spoiler, bien entendu.