La jeune fille de l'eau
Cinéma / Critique - écrit par Nicolas, le 23/08/2006 (
Jusqu'ici, la relation Disney / Shyamalan ressemblait à une histoire d'amour, ou tout au moins à une solide amitié. Mais pour des raisons qui pourraient ressembler à certaines évoquées dans ma critique, la firme refusa de produire le conte pour enfants de M. Shyamalan malgré la conviction que portait le réalisateur en son projet. A tel point qu'il décida de rompre tout contact et de se tourner vers la Warner, qui récupèra alors le bébé. « Bébé », le mot est juste, car tout commença à partir d'une histoire imaginée par le papa cinéaste pour assoupir ses enfants...
Cleveland Heep (Paul Giamatti), petit concierge reclus dans un immeuble de Philadelphie, découvre en pleine nuit une jeune fille barbotant dans la piscine. Celle-ci révèle bientôt être une Narf, Story (Bryce Dallas Howard), une créature du monde bleue venue sur Terre pour inspirer les hommes et plus particulièrement un petit écrivain côtoyant Cleveland. Si la mission de la créature ne semble pas relever de la bravoure, retourner dans son monde natal est une toute autre affaire : un Scrunts, une créature maléfique, rôde dans l'immeuble pour dévorer la jeune nymphe...
J'ai pour habitude, et je n'en éprouve aucune honte, de ne pas tarir d'éloges lorsqu'il s'agit de parler du cinéma de M. Night Shyamalan, et de me déclarer fan du réalisateur hindou. Aussi, au regard des pièces qui m'ont été dévoilées aujourd'hui pendant la séance, je propose de considérer La Jeune Fille de l'Eau comme une volonté propre du cinéaste de prendre à contre-pied son talent en l'honneur d'une cause probablement juste que lui seul pourrait connaître (la deuxième alternative à cette interprétation étant le manque de discernement et un réel manque d'inspiration - analyse bien trop terre à terre). Car qualifier ce film d'échec artistique au sens large apparaît vite, avec le recul, comme une évidence à peine voilée par les succès passés du réalisateur. Epongeons direct la prestation des acteurs dans l'ensemble très correcte, même en considérant la fadeur du personnage de Story, et penchons nous sur tout le reste. Qu'est-il arrivé au porté de caméra de Shyamalan ? Pourquoi a-t-il décidé de consacrer une large partie de son film à des effets de style hideux basés sur la profondeur de champ ? Et s'il n'y avait que ça ! Le montage boulonne encore davantage le fiasco en se bornant dans les plans séquences fixes et en cherchant, me demandez pas pourquoi, à tourner les discussions du point de vue de la nymphe. Pire, l'enchaînement des évènements met à jour des raccords relativement incohérents, et des longueurs immondes qui diluent l'intrigue dans d'interminables minutes. Et le scénario ! Nom d'une pipe, le scénario ! Autant peut-on comprendre qu'une histoire de chevet apparaisse naïve et un peu téléphonée, autant une mauvaise transposition au cinéma la transformera en histoire niaise et dénuée d'intérêt. Et y a-t-il réellement une logique dans le comportement des protagonistes, dans leur évolution, leur but ? Chaque personnage possède sa propre thématique complètement désamorcée par le propos du film et sa stupidité intrinsèque, la palme revenant à l'antipathique critique de cinéma probablement amené dans le scénario par le réalisateur comme objet de vengeance personnel - un ridicule de plus qui s'ajouter à la note si tel est vraiment le cas.
Non, vraiment, pas grand-chose à sauver de cette Jeune Fille de l'Eau, comme si le réalisateur pourtant si doué avait proprement oublié ce qui avait fait de lui un cinéaste applaudi. Bouillon également pour la petite Bryce Dallas Howard qui, sous son horrible coiffure et son teint blafard, ne parvient pas à nous arracher la moindre petite once de compassion - chose étonnante quand on s'aperçoit du pouvoir qu'elle exerce sur le casting.