7/10Happy Sweden

/ Critique - écrit par nazonfly, le 13/05/2009
Notre verdict : 7/10 - Abba la Suède ! (Fiche technique)

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Quelle est l'influence du regard des autres sur notre comportement ? C'est en substance la question que se pose Happy Sweden en illustrant son propos de quelques exemples.

S'il y a un pays qui cristallise tous les espoirs, toutes les envies, c'est bien la Suède : de grands éphèbes blonds en bonne santé, de superbes blondes perchées sur des jambes de trois kilomètres de long, un peuple sportif, intelligent, ouvert et libéral (dans le bon sens du terme). Bien évidemment comme tous les clichés, cette vision idyllique est assez éloignée de la réalité quotidienne des Suédois. C'est en tout cas ce que veut nous montrer Ruben Östlund dans De Ofrivilliga, qui atterrit sur nos écrans sous le nom de Happy Sweden.

De l'influence du regard des autres

Happy
Désolé, trop jeunes pour vous
Östlund a construit son film autour de cinq tranches de vie, mais en conservant une image principale, celle de l'influence du regard des autres sur nos actions. La scène qui vient tout de suite à l'esprit est cette expérience dans une classe où une élève change complètement son point de vue pour se conformer à la majorité. Cette scène décrit, en quelque sorte, le thème principal de Happy Sweden. Des petites poufs de 13 ans au fier patriarche en passant par l'homosexuel refoulé, tous n'ont en effet qu'un seul souci : se calquer sur ce qu'ils estiment être la norme, et poussent même le raisonnement jusqu'à l'absurdité. Ainsi les adolescentes singent leurs idoles (on imagine les version suédoises de Beyonce ou des Pussycat Dolls) en mettant en avant décolletés et strings. Le digne personnage âgé aurait sans doute une attitude ferme face à ces ados, mais quand il lui arrive un accident, il préfère lui aussi sauver les apparences en taisant ses douleurs. Comme on dit, the show must go on.

Défauts de la société

Happy
De l'importance de bien savoir planter son drapeau
En parallèle à ce thème principal, Östlund expose, par petites touches, d'autres phénomènes de société. Il y a ce professeur qui maltraite physiquement un élève tandis que les autres professeurs préfèrent gloser sur la situation sociale de la mère : le système scolaire suédois n'est pas exempt de défauts et a aussi ses laissés-pour-compte de l'éducation. Happy Sweden aborde aussi le phénomène de binge drinking, ces bitures express qui frappent la jeunesse du Nord de l'Europe avec une alcoolisation de plus en plus précoce et des conséquences qui peuvent être dramatiques. Il y a aussi la difficulté de vivre sa sexualité comme on le veut : même en Suède, le poids d'une sexualité différente est difficile. Autant de thèmes qui se cachent plus ou moins derrière le vernis des apparences.

Evidemment très proche de nous

Happy
Bucolisme suédois
Par une utilisation abusive de longs plans séquence, Ruben Östlund dissèque cliniquement la vie et plonge le spectateur dans une Suède qu'il n'a pas forcément l'habitude de voir ou d'imaginer. Mais comme souvent, bien plus que la Suède, c'est toute la société occidentale qui est visée par ce film. Le spectateur pourra facilement rattacher les différentes scénettes à des situations réelles qu'il a connues. Car le regard des autres est tout aussi important en France, pour parler de notre cher pays, qu'en Suède. Et tous les thèmes abordés seraient facilement transposables à l'Hexagone : selon les médias, le phénomène du binge drinking est en train de fortement progresser en France. Au contraire sans doute du bon vieux temps d'autrefois cher à Pernault, où les bébés buvaient un peu de gnôle dans leurs biberons et où l'alcoolisation quotidienne était plus importante qu'aujourd'hui. mais c'est un autre débat. Et la nécessité du bien paraître semble prendre une place de plus en plus prépondérante dans la société.

 

Comme L'art de la pensée négative, Happy Sweden fait tout pour s'éloigner des clichés sur la Scandinavie et pour montrer que la perfection, même en Suède, n'existe pas (la preuve, il n'y a pas de belles Suédoises dans Happy Sweden). C'est un peu rassurant pour le Français à qui on présente souvent le système suédois comme idéal à atteindre. Happy Sweden nous montre finalement une Suède beaucoup plus proche de la France. Le principal bémol du film concerne la forme, lente et fixe, qui rebutera plus d'un spectateur.