8.5/10La frontière de l'aube

/ Critique - écrit par Guillaume, le 18/10/2008
Notre verdict : 8.5/10 - Au bord d'une nouvelle ancienne vague (Fiche technique)

En France, on a une certaine idée du cinéma. Quand on décide de réunir, pêle-mêle, Louis Garrel, une image en noir et blanc, un scénario sur l'amour, la folie, des échos révolutionnaires et le fantastique, on pense être arrivé dans un port connu, celui du cinéma bourgeois français, faisant écho au "bonheur bourgeois" évoqué dans le film.

Carole (Laura Smet)
Carole (Laura Smet)
Quoi qu'il en soit, dès les premières minutes les a priori s'envolent. La photographie en noir et blanc est renversante, les clairs-obscurs à pleurer. Laura Smet présente une beauté d'autant plus notable qu'elle est saisie avec une maîtrise émouvante.

François (Louis Garrel), photographe de son état, fait un reportage sur Carole (Laura Smet), star du cinéma. Les deux se plaisent, et l'amour survient. Malgré les ennuis de Carole avec l'alcool et son sens de la dépression bien ancré, François persiste, jusqu'au jour où le mari de l'actrice revient d'Hollywood.

Lâche, ou respectant peut-être le retour du mari, François disparaît et retrouve l'amour chez une autre femme. Carole sombre et après un passage en hôpital psychiatrique met fin à ses jours. François, entre la peur de s'engager auprès de sa nouvelle compagne et son amour pour Carole qu'il perçoit de plus en plus fort, semble un peu perdu.

La frontière de l'aube est une belle histoire d'amour entre deux êtres, même pas touchée par la rupture, bien que tentant de s'attacher à des ersatzs pour en finir. Le propos est jusqu'au-boutiste, oscillant entre folie et fantastique.
Si le film démarre de merveilleuse façon laissant présager le meilleur, à partir du passage en HP, on ressent une certaine lassitude apportée par une réalisation qui s'emballe, donnant l'impression d'être un hommage à d'autres films plus anciens, ce qui en soi n'est pas un mal. Les transitions sous forme d'un fondu au noir cerclé, l'ambiance de l'HP et le côté impressioniste de la manifestation du surnaturel (ou de la folie ?) sont autant d'éléments qui semblent être extraits d'un autre âge, déroutant le spectateur en le faisant hésiter entre la farce et le drame.

François (Louis Garrel)
François (Louis Garrel)
Louis Garrel n'est pas au meilleur de sa forme. Toujours cantonné dans un rôle de dilletante un peu mystérieux et séduisant, il est ici moins efficace avec dix centimètres de cheveux en trop cachant bien souvent son expressivité. François incarne un certain idéal de l'homme, on pourrait le remplacer par tout autre dans cette histoire d'amour où Carole est elle au contraire unique, tout comme, plus tard Eve (Clémentine Poidatz) sera irremplaçable.

La frontière de l'aube est un film qui se contemple. D'abord avec une grande gourmandise pour sa photo, puis avec plus de circonspection, voire de l'étonnement, et parfois de l'ennui. Pourtant, on restera attaché à son siège tout au long du déroulement de cette histoire d'amour extrême, jusqu'au dénouement, fatal.