7.5/10Au bout de la nuit

/ Critique - écrit par Flob, le 17/08/2010
Notre verdict : 7.5/10 - À bout toute la nuit (Fiche technique)

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L'univers dépeint par David Ayer et James Ellroy, pourri par une institution policière corrompue, possède un charme certain mais ne brille pas par l'originalité de son scénario et sa moralité ambigüe.

Un écrivain de polars reconnu reconverti en scénariste, un scénariste de films policiers réussis reconverti en réalisateur ; quoi de mieux pour mettre en scène un flic reconverti en juge et bourreau ?
Les deux hommes s'étaient en fait déjà rencontrés indirectement, David Ayer ayant adapté pour le cinéma un roman de James Ellroy avant de lâcher les stylos au profit des caméras. Maintenant, il a la lourde tâche de porter à l'écran le premier scénario du célèbre auteur américain, l'histoire d'un policier qui va devoir lutter contre le système corrompu qu'il a lui-même aidé à se développer, synopsis :


"A qui achètes-tu cette moutarde ?!!!"
Une grosse muscle car aussi obscure que son propriétaire et les décors qu'ils traversent. Des lumières qui défilent à vive allure sous les yeux d'un homme qui n'a vraisemblablement pas choisi entre boire ou conduire. Le détective Tom Ludlow (
Keanu Reeves) s'enfonce dans la noirceur des bas-fonds de Los Angeles, descendant les criminels avec autant de facilité que les mignonnettes de vodka. Ses pratiques radicales, bien que camouflées par son expérience du terrain, ses collègues de l'Ad Vice, et son supérieur le capitaine Wander (Forest Whitaker), éveillent bien entendu les soupçons. Une enquête interne lui tombe alors dessus, menée par le capitaine Biggs (Hugh Laurie), apparemment assisté par son ancien partenaire qui ne le porte plus vraiment dans son coeur, l'agent Washington (Terry Crews). Et ses affaires ne vont malheureusement pas s'arranger, car ce dernier est assassiné à quelques mètres de lui, criblé de balles par deux gangsters cagoulés. Il ne lui reste alors plus qu'à retrouver les responsables afin de venger son ancien équipier et prouver son innocence.


"Je ne tiendrai jamais jusqu'au bout de la nuit..."
Rien de bien original dans l'histoire et son traitement à première vue. Un flic perdu entre deux mondes, à la limite voir au-delà de l'éthique, sombrant parcimonieusement vers un point de non-retour depuis la perte d'un être cher. Puis un déclic, qui pourra peut-être tout changer et ramener cet homme qui n'est plus que l'ombre de lui-même vers la lumière. Cependant, notre héros reste très attaché à ses méthodes, et ses gros muscles ne sont pas près de se reposer à la faveur de négociations mesurées.
Film policier c'est certain, mais aussi film de bourrin, l'enquête n'ayant ici qu'un but, permettre à Ludlow d'identifier la prochaine étape et de s'y jeter les deux pieds en avant. La réflexion comme antichambre de la destruction. Et alors que le spectateur s'attend néanmoins à suivre un homme le long d'un parcours initiatique vers la rédemption, ou du moins vers la paix intérieure et le changement, voici que ce dernier s'acharne à suivre la même ligne de conduite, le ménage par le vide.


"Quoi ? Il n'est pas beau mon pyjama ?!"
Heureusement, cet itinéraire jusqu'au bout de la nuit est filmé de bien belle manière. Et même si les plans n'ont rien d'originaux ou fantastiques, ils ont le mérite d'apporter une ambiance noire transpirante d'immoralité, servie par des décors de ghettos réalistes et des protagonistes pourris jusqu'à l'os.
Et en bon réalisateur de thriller, David Ayer fait avancer son film dans cette atmosphère oppressante en déroulant sa bobine, certes faite d'un fil un peu gros, mais cependant constituée d'assez de noeuds pour égarer ponctuellement le spectateur et le faire douter sur la moralité de sa galerie importante de personnages.
Ainsi, le casting est judicieux et les acteurs pertinents. De la tête de premier de la classe du jeune détective joué par Chris Evans (la torche humaine des 4 Fantastiques), au capitaine incarné par Hugh Laurie aussi sympathique qu'à la télévision, en passant par Forest Whitaker en supérieur protecteur trop gentil pour être honnête, les rois de la nuit (Street kings est le titre en VO) ont des traits de caractères riches de différences.

L'univers dépeint par David Ayer et James Ellroy pourri par une institution policière corrompu possède un charme certain, même s'il ne brille pas par l'originalité de son scénario et de ses situations. Cependant, le message ambigu sur la moralité et la manière d'en faire fi pour atteindre son but donne une orientation glaciale trop action de série B à un film à l'ambiance chaude très polar de qualité A.
Un parcours jusqu'au bout de la nuit gâché par un réveil brutal avant le petit matin.