Adam's Apples
Cinéma / Critique - écrit par knackimax, le 09/09/2008 (Tags : adam film ivan apples thomas jensen anders
Film danois décadent et décalé rempli d'humour brutal et teinté d'existentialisme amusé. Un plaisir de bons moments mêlés d'incompréhension et d'angoisse. Très bon mais très rude.
Adam est un néo-nazi qui sort de prison. Il est envoyé en pénitence chez Ivan, un curé entre deux âges qui s'occupe d'un foyer de réinsertion pour anciens délinquants malfaisants. Lorsque Adam se retrouve confronté à la folie d'Ivan, élu de Dieu, son mode de raisonnement destructeur se retrouve éprouvé dans le plus profond de sa construction idéologique. Deux questions se posent alors. S'agit il d'une épreuve de Dieu ? Adam arrivera-t-il à accomplir son but dans la vie : faire un gâteau aux pommes ?
Au delà d'une apparente incohérence dramatique censée établir les bases d'un
humour décalé des plus audacieux, celui-ci ressemblant à une mauvaise blague des plus osées, le film en question donne à réfléchir. En effet ce n'est pas tous les jours que l'on met en application le principe de tendre l'autre joue face à un adepte de Adolf des plus violents. Si la violence est d'ailleurs un des acteurs principaux de ce film, elle se retrouve opposée à la folie pure, celle d'un homme dont le seul but est de l'occulter sans même la remettre en cause. C'est un peu comme si le test de la foi prenait le chemin de la mauvaise pour éprouver l'homme et la bête en son jardin sans se soucier des dégâts.
« Ne nous hâtons pas vers des conclusions hasardeuses, il s'agissait d'un vieux chat. Il est probablement tombé au moment où Khalid tirait. »
Adam se retrouve en compagnie de Khalid, un Saoudien qui braque les stations services suédoises pour récupérer l'argent spolié à son peuple, Grunnar, ancien espoir du tennis Danois et nouvel alcoolique et kleptomane, Sarah, future mère célibataire d'un petit enfant handicapé qu'elle a eu avec un inconnu en Indonésie,
Poul, ancien SS travaillant dans les camps de la mort à l'extermination de ces peuples dits inférieurs et Ivan bien évidemment, veuf d'une femme qui s'est suicidée à la suite de la naissance de leur enfant handicapé moteur, celui-là même qu'Ivan soupçonne dans son conscient infini de jouer au baseball en cachette. Voici donc la base de rapports sociaux que vous imaginez déjà bien difficile. Pourtant lorsque l'on nie l'existence d'un autre que Dieu, rien n'est impossible.
« Adam, penses-tu vraiment que ce soit le moment d'en parler ? Je ne pense pas et si c'était le cas de toute façon tu perdrais à cette discussion.
- Revenons au problème de Sarah. Sarah, tu dois garder cet enfant car...
- ... Adam pourquoi est-ce que Sarah n'a que deux gâteaux dans son assiette alors que j'en ai trois? »
On suivra donc d'un œil amusé et étonné ce petit groupe dysfonctionnel se faire mal à la surface, surface qui n'existe plus pour aucun d'entre eux depuis longtemps. C'est un peu comme rassembler Gandhi et Hitler autour d'un pommier pour leur faire danser la farandole avec le lapin Duracell dans un fauteuil roulant, le tout accompagné de Blanche Dubois et de Yannick Noah avec la Lune comme seul guide spiritue
l. On obtient alors un fantasme d'un humour particulièrement fin bien que décalé, qui enfonce toutes ces portes fermées que l'inconscient sait si bien fermer pour le plaisir des psychologues.
Il va sans dire que dans le jardin qui entoure cette église qui contient elle même une population particulièrement diverse, on observe une petite lueur d'espoir pour le monde, comme un microcosme fantasmé de toutes les différences unies face à une population alien si humaine et si incompréhensible, face à un firmament violent ou les dieux font tomber la foudre sur leurs enfants et leurs créations. Les grandes questions de l'existence ne trouvent pas pour autant de réponse mais une raison d'exister, un avenir sans horizon si ce n'est la ligne au bout du jardin derrière le pommier, le bout du monde rêvé, et si rarement atteint...
Un film très intense donc malgré une réalisation trop naïve pour son sujet, lequel semble maîtrisé à la quasi perfection grâce à un rire malsain et lancinant qui nous donne malgré nous l'impression de vivre dans cette principauté de fous furieux, d'être un homme parmi ces hommes, un grand malade comme les autres.