Une vie moins ordinaire
Cinéma / Critique - écrit par riffhifi, le 02/12/2008 (Après Trainspotting, Danny Boyle passe à Hollywood par une case bien étrange. Le film est déroutant, imparfait mais terriblement réjouissant. Va-t-on lui reprocher de contenir trop d'idées ?...
En 1997, Hollywood met le grappin sur un quatuor écossais qui vient de remporter deux succès consécutifs appelés Petits meurtres entre amis et Trainspotting : Andrew Macdonald (producteur), John Hodge (scénariste), Danny Boyle (réalisateur) et Ewan McGregor (acteur) semblent donc constituer un ticket gagnant pour Twentieth Century Fox, qui leur propose un budget confortable et la présence de Cameron Diaz en échange d'une comédie romantique. Le résultat s'appelle Une vie moins ordinaire : le film coûte 12 millions de dollars et en rapporte à peine neuf au cours de son exploitation en salles (la vidéo finira d'amortir le budget). On imagine la déconvenue des financiers du studio, qui avaient bavé l'année précédente devant les chiffres de Trainspotting (qui avait coûté 3.5 millions de dollars et en avait rapporté plus de 30). Suite à cet échec, il
Des vêtements moins ordinairesfaudra deux ans pour que John Hodge et Danny Boyle puissent tourner La plage... Rétrospectivement, Une vie moins ordinaire apparaît comme une curiosité difficile à cerner, à la fois un point faible dans la filmographie de ses auteurs et une réelle bouffée d'oxygène grâce à son incongruité enthousiaste.
Robert Lewis (Ewan McGregor), agent d'entretien dans une grosse société, écrit des romans de gare dont personne ne veut. Lorsqu'il perd son boulot et sa copine le même jour, il décide de faire un esclandre à main armée dans le bureau de son patron Mr Naville (Ian Holm). La confrontation dégénère, et Robert s'improvise kidnappeur à la vue de Celine (Cameron Diaz), la fille de Naville. Mais ce n'est pas le destin qui a rapproché Robert de Celine : leur union constitue la mission de deux anges (Holly Hunter et Delroy Lindo), qui viennent de se faire passer un savon par l'ange Gabriel (Dan Hedaya), mécontent de la versatilité des relations amoureuses à l'aube du XXIème siècle.
Le plan-clé du film, proposé à deux reprises, représente un cœur brutalement traversé par une balle de revolver. Explosant sous le choc, le cœur fait littéralement boum, illustration de la malice du scénariste et de sa volonté de
Des jeux érotiques moins ordinairesmoderniser la notion de romantisme : les anges de l'amour ne sont plus armés d'un arc et de flèches, mais d'un calibre .45... Le joyeux bordel qui en résulte est un brassage de genre cuisiné avec gourmandise : récit policier pimenté d'humour noir, comédie romantique à base de caractères antagonistes, fantaisie surnaturelle impliquant les forces de l'au-delà, clip psychédélique démontrant le goût de Danny Boyle pour les transitions surprenantes et la musique techno-pop de Leftfield...
Dans le déluge d'idées visuelles et narratives exhibées par le duo, du Paradis à l'immaculée blancheur (piqué au film de Michael Powell et Emeric Pressburger Une question de vie ou de mort) jusqu'au film d'animation cocasse du générique final, l'histoire d'amour finit par apparaître un peu en retrait, sauf lors de quelques percées inspirées comme la scène du karaoké. Et si la liberté de ton et de contenu paraît évidente (et donne une idée du relatif bras d'honneur fait au studio commanditaire), le résultat manque un peu trop de cohérence pour convaincre totalement. Mais on se satisfait sans peine de la sophistication visuelle de Danny Boyle et des beaux numéros d'acteurs présentés... bien qu'on regrette l'absence de Sean Connery, qui a refusé le rôle de « Dieu jouant au golf ». Quel manque de solidarité pour ses compatriotes écossais.