7/10Total Recall

/ Critique - écrit par nazonfly, le 04/05/2008
Notre verdict : 7/10 - Embolie schizophrénique (Fiche technique)

Tags : total film recall quaid verhoeven science fiction

Quand l'homme se met à modifier les souvenirs, il devient difficile de distinguer rêve et réalité. Heureusement, l'ami Schwarzy va tenter de débrouiller tout ça pour nous.

Doug Quaid (Arnold Schwarzenegger, muscles bandés) est comme Martin Luther King : il a un rêve. Certes le sien est largement plus égoïste : il veut simplement partir sur Mars. Et, qui sait, retrouver peut-être cette brune sauvage qu'il voit toutes les nuits sur ses terres martiennes oniriques. En 2048, voyager sur Mars n'est guère un problème; mais on ne peut pas dire que sa femme, Lori (Sharon Stone, nuisette transparente) soit tout à fait du même avis. La solution ne peut venir que de Rekall, société spécialisée dans les souvenirs de vacances. Non, en 2048, heureusement, les boules à neige ont, semble-t-il, disparu et Rekall travaille plus dans l'implantation de souvenirs modifiés. Des vacances sans avoir besoin de bouger de son siège, des vacances sans risques et à moindre prix. Et en supplément, on offre même la vie d'un agent secret !

C'est à cet instant précis que survient l'élément perturbateur : l'embolie schizophrénique... A peine implanté, Doug verra surgir un passé étonnant : celui d'un agent secret justement. Et c'est parti pour l'aventure ! Action, baston, flingues partout, justice nulle part. Un grand méchant du genre à asphyxier des poissons rouges, et deux beautés, symboles du bien et du mal, côté sombre et côté lumineux. Mais qui a raison, qui a tort dans cette histoire ? Quaid vit-il son rêve d'agent secret ou est-ce la réalité qui l'a rattrapé ?

Inspiré d'une nouvelle de Philip K. Dick (sans doute l'un des auteurs de science-fiction les plus adaptés au cinéma avec des réussites comme Blade Runner ou A Scanner Darkly, et des semi-plantages comme Minority Report ou des nullités comme Paycheck), Total Recall est un classique de la science-fiction. Mutants, ville cradingue opposée à la ville haute à tendance classieuse, un médium qui parle par énigmes, une mystérieuse agence qui ourdit de sombres complots, des terminaux d'ordinateurs partout, un monde envahi par la pub, Total Recall semble condenser en une heure et demie tous les films de science-fiction.

De la dance music en 2048 ?

Un film de SF se déroule dans le futur; et pourtant il est, en général, terriblement représentatif de l'époque à laquelle il a été tourné. Total Recall en est un parfait exemple. Malgré l'année 2048 fièrement affichée, le film est clairement daté début des années 90. Vêtements et choucroutes capillaires, qui auraient été parfaits dans Les Années Collège, déparent franchement quand on parle de Mars.

S'il y a un autre écueil que rencontre la SF au cinéma, c'est le vieillissement des décors. Avant l'arrivée des effets spéciaux numériques (qui seront bien évidemment eux aussi dépassés), les vaisseaux spatiaux et autres bases martiennes sentaient bon le carton pâte et les films tournés en studio. Là encore Total Recall montre quelques beaux ratages. Certes on pourrait argumenter que ces décors font une partie du charme du film, mais on est parfois très proches de l'esprit Plan 9 From Outer Space du mythique Ed Wood.

Reconnaissons toutefois quelques belles réussites au niveau des maquillages. Total Recall est, en effet là encore, représentatif d'un genre. Rares sont les futurs où l'homme existe seul, extra-terrestres et mutants lui partageant généralement l'affiche. Si les Hommes-Poissons ou les Hommes-Pierres ont souvent assez mal vieillis (comme le montre le blog de Lestat), les mutants de Total Recall passent encore très bien à l'écran, même dix-huit ans après le film. Dans le même ordre d'idée, les transformations sont terrifiantes et vraiment bien réalisées.

Dreams are my reality

Un film de SF est l'occasion de dénoncer quelques dérives ou d'apporter des pistes de réflexion au spectateur, en plus de lui fournir un spectacle à grande échelle. Chaque époque a ainsi sa thématique futuriste si l'on peut dire. La Guerre Froide engendra un grand nombre de films sur l'invasion alien (The Thing, It came from Outer Space), le peur de l'atome généra des films post-apocalyptiques (Mad Max), les années 2000 seront celles de l'eugénisme et du clonage (Bienvenue à Gattaca, L'Attaque des Clones). Total Recall aborde, de la même façon, des thèmes contemporains aux années 90 : problèmes énergétiques, destruction de la couche d'ozone sont quelques pistes de réflexion intéressantes bien que succinctement évoquées.

De toute évidence, le thème principal, et la réussite du film, est cette constante incertitude entre rêve et réalité. Il est difficile de trancher, même après le générique de fin, entre ce qui s'est réellement passé et ce que Quaid a rêvé ou imaginé. Le seul bémol est que Total Recall ne va pas assez loin dans le questionnement de la réalité, au contraire d'un Matrix ou d'un eXistenZ, et se contente finalement du seul prisme de la vie de Doug Quaid.

Total Recall est donc, malgré ses nombreux défauts (ne citons ici que l'abominable Mars la rouge qui choque dès les premières minutes), un film plutôt agréable qui tiendra le spectateur en haleine et le fera même réfléchir deux secondes et demi. Ne boudez pas votre plaisir. Surtout si vous aimez les gros plans sur les muscles schwarzeneggeriens.