Silent Hill
Cinéma / Critique - écrit par Nicolas, le 25/04/2006 (Tags : silent hill jeux konami xbox video playstation
Je sais ce que vous pensez. Vous vous dites que Christophe Gans a beau être un bon réalisateur, sa tendance à partir en vrille dans ses concepts n'augure rien de bon pour un film comme Silent Hill (je ramène à votre mémoire le fameux indien capoeiriste du Pacte des Loups). Surtout que le jeu, un best-seller dans la catégorie Survival Horrifique fort de quatre épisodes sur divers supports, rassemble autour de lui un certain nombre de fans à travers le monde, à ne surtout pas trahir. Une bonne raison pour jouer la sécurité, et sappuyer sur des concepts scénaristiques déjà connus, puisés principalement dans le premier volet.
La petite Sharon (Deborah Unger) est somnambule. Dans ses délires nocturnes, elle n'a de cesse de répéter le nom d'une ville : Silent Hill. Silent Hill... Contre l'avis de son mari, sa mère, Rose (Radha Mitchell), décide de l'y emmener pour tirer les choses au clair. A l'entrée de la ville, le véhicule manque de percuter une enfant, sur la chaussée. Quand Rose reprend connaissance, Sharon a disparu...
S'il y a bien une chose que l'on ne peut reprocher à Christophe Gans, c'est d'avoir voulu coller le plus possible à l'esprit du jeu. Les fans n'y trouveront probablement rien à redire, tant les comparaisons et les retranscriptions exactes sont nombreuses, comme le montrait déjà partiellement la bande-annonce. Ainsi, non seulement les lieux représentatifs de Silent Hill apparaîtront comme il se doit (le fameux Brookhaven Hospital, notamment), mais la ressemblance passera même par la reproduction des textures et des architectures cauchemardesques visibles dans chacun des opus. Les créatures ne seront pas en reste, et même si celles-ci ne forment pas vraiment un échantillon exhaustif du bestiaire de Silent Hill, les plus représentatives répondent présentes, à l'image de cette Tête de Pyramide plus vraie que nature, et d'un groupe de furieuses infirmières pas bégueules sur le scalpel. Comble du bonheur, Gans multiplie les angles biscornus chers aux jeux de survival horror, et utilise à foison la musique très spéciale des jeux d'Akira Yamaoka.
Pourtant, il y a un réel problème. Quelque chose d'indéfinissable. Peut-être que le fait de ne plus avoir les commandes du héros enlève quelque chose à l'ambiance, ou bien serait-ce les quelques scènes ancrées dans la réalité, mettant en valeur les investigations du mari de l'héroïne. Bref, nous ne sommes plus tout seul devant l'écran dans une chambre à demi éclairée, le pad en main, à flipper au moindre petit bruit suspect. L'ambiance ne fonctionne pas. Et il suffit qu'un spectateur, dans une réaction volontairement peu maîtrisée, se gausse à l'apparition d'un monstre difforme cracheur d'acide pour que le charme soit rompu. Surtout que Gans, dans son désir de suivre les codes du jeu, en oublie certains codes du film d'horreur. La règle est loin d'être générale, fort heureusement, et si Silent Hill n'est pas un digne représentant dans la catégorie Effroi, quelques moments intenses font leur petit effet.
Et puis, il y a eu des choix. D'abord celui de placer le plus grand nombre possible de « Sharon » hurlé, ou encore de créer un jeu de piste simpliste comme base du scénario. Ce dernier, loin d'être mauvais, fait parfois dans la facilité, mais s'insère très judicieusement dans une logique Silent Hill, macabre et ésotérique à souhait. Dommage de terminer ce cauchemar éveillé dans un bain de sang de plus ou moins mauvais goût. Et si octroyer le premier rôle à Radha Mitchell pourrait se défendre, créer un personnage pour Sean Bean ou une femme flic culottée n'apporte pas grand-chose de plus au film.
Une adaptation loin d'être ratée, mais rayée de nombreux défauts qui laissent un arrière goût un peu pâteux. Certes, la durée n'est pas rédhibitoire, et la tension croît tout au long du film, mais il demeure quelque chose en ce Silent Hill qui le rend difficile à pleinement apprécier. Au moins, Gans est presque irréprochable sur ses choix.