Le Parfum : histoire d'un meurtrier
Cinéma / Critique - écrit par weirdkorn, le 05/10/2006 (
Voilà l'adaptation tant attendue du sublime roman de Patrick Süskind, Le parfum. L'histoire sombre et dérangeante d'un être hors du commun qui a utilisé son extraordinaire talent de façon maléfique. Dans la France du XVIIIème siècle naît Jean-Baptiste Grenouille, un homme à l'odorat si fin et développé que sa perception du monde est olfactive. Son unique désir est simple : capturer les plus belles odeurs du monde afin de fabriquer le parfum ultime. Mais la plus belle des odeurs est celle du corps d'une femme et Jean-Baptiste est prêt à tout pour se l'approprier...
De nombreux réalisateurs (Kubrick, Scorsese ou Milos Forman) avaient déjà essayé d'adapter l'ouvrage et c'est finalement l'allemand Tom Tykwer qui a hérité du projet. Au vu du résultat, le choix a été le bon puisque le cinéaste s'en sort haut la main, réussissant à suivre la trame principale du roman mais surtout à retranscrire son atmosphère si poisseuse et fantastique. Cette performance tient avant tout à la force du personnage de Jean-Baptiste Grenouille. Ben Wishaw est sensationnel dans ce rôle d'homme de l'ombre qui ne vit que pour son obsession. Il dégage un mélange de candeur et terreur, de faiblesse et de puissance qui le rapproche de l'animal.
De même, le réalisateur a poussé le niveau de détail extrêmement loin pour se fondre au mieux dans l'atmosphère du roman. La reconstitution du Paris ou de la Provence de l'époque est parfaite à l'instar de l'aspect de chaque personnage, d'une crasse putride pour le tanneur à la beauté troublante de la jeune fille à l'odeur parfaite. Grâce à ce réalisme cultivé, la perception de l'entourage a pu être amplifiée, chaque élément étant mis en relief. Pour renforcer cet effet, le réalisateur a filmé très rapidement ou langoureusement à l'aide de gros plans tous les objets à l'odeur importante au personnage principal. Ce système permet de rentrer dans la tête de Grenouille et de ressentir le monde de sa manière : à l'odorat. De plus, la musique, également composée par Tom Tykwer, s'insert parfaitement dans l'action et renforce idéalement les effets d'ambiance. Seule la dernière partie est moins réussie. Bien qu'ayant suivi les passages clé du roman, l'histoire traîne et se focalise trop sur certaines scènes qui auraient mérité d'être exposées plus rapidement.
Le parfum est clairement une bonne adaptation. Le réalisateur a eu du nez. Même sur un sujet périlleux, il parvient à tourner un très bon film qui satisfera les amateurs du roman comme les cinéphiles. Porté par une interprétation exceptionnelle du personnage central et le sentiment de sentir le monde à travers lui, le film réussit là un véritable tour de force. Il est seulement dommage qu'il ait du mal à garder son rythme dans la dernière ligne droite.