Mémoires de nos pères
Cinéma / Critique - écrit par weirdkorn, le 26/10/2006 (Tags : film eastwood clint guerre jima iwo cinema
Stars and tripes
Est-ce encore la peine de préciser que Clint Eastwood est un grand monsieur du cinéma ? Son dernier pari est de réaliser un double film sur la bataille d'Iwo Jima. Double dans le sens où cette page de la guerre sera filmée sous deux points de vue différents, celui des assaillants Américains mais aussi celui des Japonais qui défendent leur position. Avec Mémoires de nos pères, nous voilà plongés sous le "Stars and Stripes" dans le monde viril des Marines.
Iwo Jima devait être un tournant de la guerre du Pacifique puisque les Américains avaient comme but de s'emparer pour la première fois d'un territoire originellement japonais et d'y installer son front. Cette opération aussi importante stratégiquement que moralement devait avant tout marquer les esprits. C'est sur cette base que le film a été construit puisqu'il délaisse rapidement les tactiques guerrières et les conquêtes territoriales. Iwo Jima a été un symbole et une photo en a été son emblème, celle où l'on voit six Marines dresser fièrement le drapeau américain. Ce cliché devint rapidement un élément de propagande et une source de motivation pour le peuple américain.
C'est avec ce type de film que l'on peut voir la patte de Clint Eastwood et l'étendue de son talent. Il prend un détail que tout le monde connaît, le développe et lui donne vie à travers une histoire profondément humaine filmée tout en retenu et en finesse. Jamais il ne verse dans le patriotisme ou le pathos. Il n'y a pas de morts au ralenti mais des tripes qui sortent du bide, pas d'exaltation nationaliste mais une réflexion sur le fonctionnement du système et c'est ce que l'on aime. Mémoires de nos pères raconte la vie d'hommes perçus au pays comme des héros alors qu'ils se sont juste trouvés là au bon endroit au bon moment, ou plutôt au mauvais endroit au bon moment. Le film jongle ainsi entre des scènes de guerre féroces agrémentées d'effets spéciaux et le retour de ces porteurs de drapeau sur le sol américain pour promouvoir l'effort de guerre. Toutefois, le film prend peut-être trop de recul sur les événements et ne comporte pas la puissance émotive que l'on retrouvait par exemple dans Million Dollar Baby. De plus, le rythme a du mal à prendre et s'avère longuet dans sa dernière partie.
On retrouve dans Mémoires de nos pères le style propre à Clint Eastwood, c'est-à-dire une histoire à la fois grave et modeste et des images toujours classes et poignantes. Un bon film de guerre qui se démarque du genre par son approche humaine du sujet. Vivement la suite de la sage avec la version japonaise : Lettres d'Iwo Jima.