7.5/10Indigènes

/ Critique - écrit par Nicolas, le 30/09/2006
Notre verdict : 7.5/10 - Il faut sauver le soldat Jamel (Fiche technique)

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Il faut sauver le soldat Jamel

Il y a des humoristes qui ne feront rien de leur carrière et passeront leur temps à montrer leur paire de fesses en vomissant à tout va tout en expliquant à qui veut l'entendre et qui ne veut pas que le premier degré peut être très drôle quand on y met les moyens (vomi + fesses, donc) ; et il y a les autres. Jamel Debbouze, indéniablement, appartient à la seconde catégorie, comme il avait pu commencer à l'affirmer avec le mitigé Angel-A de Luc Besson. Rachid Bouchareb, convaincu bien avant l'heure, lui confie la chance qu'il espérait certainement pour percer dans un autre registre que la bouffonnerie, rassemblant du même un panel de comédiens qui n'attendait que ça, eux aussi : Samy Naceri, Roschdy Zem, et Sami Bouajila.

1943. Vaincue, occupée, la France se tourne vers son empire colonial, et reconstitue son armée en Afrique. Le Caporal Abdlekader (Sami Bouajila), Saïd (Jamel Debbouze), Messaoud (Roschdy Zem), Yassir (Samy nacéri), et 130.000 autres « indigènes » se portent volontaires pour libérer la France et défendre la liberté contre l'oppression du nazisme...


En 1944, débarquaient sur les côtes normandes les bataillons alliés venus d'Amérique pour libérer la France sous occupation allemande, pendant que la résistance française s'amplifiait et combattait l'ennemi de l'intérieur. Ces deux actions conjuguées, associées à l'offensive soviétique sur le front Est, permirent aux français de retrouver leur liberté et leur dignité. Cette histoire, l'Histoire, est celle enseignée dans tous les manuels scolaires.
Pourtant, si l'Histoire s'appuie exclusivement sur des faits historiques vérifiés, elle n'en demeure pas moins incomplète. En 1944, un autre débarquement moins célèbre s'effectue au sud de la France, constitué de volontaires provenant de l'Afrique du Nord, faisant suite à une série d'âpres victoires obtenues en Tunisie, en Italie, et en Sicile.


Le débarquement allié disposait de son film depuis 1998 (Il faut sauver le soldat Ryan), Rachid Bouchareb offre au septième art le juste retour à ces hommes courageux venus défendre leur mère patrie, une terre qu'ils chérissaient et qu'ils n'avaient pourtant jamais foulé. Ces deux films, à bien y regarder, ne sont pas si éloignés l'un de l'autre, chacun démarrant sur une bataille sanglante et s'achevant dans un cimetière dédié à la mémoire des combattants. Et si la guerre en est le nerf principal, elle est retranscrite à partir de quelques destinées valeureuses, campées ici par Bouajila, Debbouze, Naceri et Zem. Si les ambitions, le point de vue, et les moyens mis en oeuvre diffèrent, le côté humain prend définitivement le pas sur le côté spectaculaire.
En cela, Indigènes est à la fois une leçon d'histoire, et un drame fictionnel. Tout au long des deux heures qu'il s'accapare, le film aborde différents thèmes centrés sur la différence, le rejet, et l'abnégation. Il prend aux tripes quand il parle d'inégalité, chatouille les cordes sensibles quand il montre le maigre retour que ces soldats obtiennent en récompense de leur bravoure et de leur dévouement. L'injustice prend des proportions faramineuses lorsque l'on s'aperçoit à quel point son absence fait défaut dans l'Histoire de France. Car si ces hommes trouvaient leurs origines au-delà de la méditerranée, ils font partie intégrante du passé de la France.


Sami Bouajila, Jamel Debbouze, Roschdy Zem, et Samy Naceri, ont obtenu le prix d'interprétation masculine pour leur participation au film. Un juste retour des choses pour la composition sans faille, bien qu'un peu stéréotypée, qu'ils offrirent au film de Rachid Bouchareb. Le réalisateur, lui, signe son oeuvre la plus aboutie, la plus mordante. La mise en scène est sans faute, quoique classique, le rythme ne décélère presque jamais, la reconstitution est palpable. Un film français comme on aimerait en voir plus souvent.