In the cut
Cinéma / Critique - écrit par Kassad, le 21/01/2004 (Tags : cut film jane campion cinema frannie dvd
"Le film qui révèle Meg Ryan". Plutôt alléchant comme argument publicitaire pour ce film de Jane Campion, lauréate d'une palme d'or à Cannes en 1994 pour la leçon de piano. Il s'agit donc d'un thriller érotique. Frannie (Meg Ryan) est prof d'anglais dans un quartier populaire de New York. Elle étudie, pour son plaisir, l'argot et note dans un petit carnet toutes les phrases qu'elle croise dans la journée (poésie dans le métro etc.). Lors d'une rencontre avec un de ses étudiants dans un bar elle est le témoin troublé d'une fellation dans les toilettes. Le lendemain elle apprend qu'une tête de femme a été retrouvée en bas de sa fenêtre. Malloy, le détective qui mène l'enquête apparaît suspect aux yeux de Frannie qui n'en débute pas moins une liaison torride avec ce dernier...
Autant le dire tout de suite ce film est un ratage à peu près complet. Pourtant tout commence plutôt bien. Campion sait filmer, cela se voit, et les premiers instants du film sont, au niveau esthétique assez réussis (une belle pluie de pétales à la Kurosawa notament). D'ailleurs, un des rares aspects positifs à mettre au crédit de ce navet, la photographie, reste plaisante tout le long du film. Il faut noter à ce sujet une prise de position assumée très "gore" plutôt étonnante : j'ai trouvé Jennifer Jason Leigh et Meg Ryan courageuses de s'être exposées sans maquillage, ni éclairage les avantageant (les ravages de l'âge sont clairement montrés). C'est assez rare pour être noté. Mais voilà un film, qui plus est un thriller où l'intrigue et la psychologie des personnages jouent quand même des rôles centraux, ne se réduit pas à un aspect plastique. Cependant dès que l'on sort du cadre esthétique, les choses se gâtent.
Le premier motif d'insatisfaction est la presque nullité totale du scénario. L'histoire policière est du niveau d'Out of Time (et croyez-moi c'est plutôt dur comme jugement). Plus précisément cette nième mise en scène d'un serial killer traumatisé dans sa jeunesse ferait bailler le plus insomniaque des spectateurs. Autre pièce à conviction : comme dans tous les policiers bas de gamme chaque petit détail est présenté de manière si "indispensable" que son rôle dans le puzzle est téléphonné à des années lumières. Par exemple la soeur de Frannie lui offre un bijou avec plein de breloques. Elle en perd une lors d'une agression... vous n'attendez qu'une chose : le moment où ce détail aura une importance. Bref rien n'est gratuit et la construction est tellement visible qu'elle vous empêche de rentrer dans le film. De plus, il est tellement mal fait qu'il ne contient aucune tension dramatique. Je me souviens avoir pensé vers le milieu qu'il pourrait continuer indéfiniment car je ne ressentais aucune progression. En analysant un peu plus, je me suis rendu compte que la raison de cette fadeur généralisée qui ressortait était que les différents personnages n'ont aucune profondeur. C'est là le plus gros point noir. En fait, que ce soit pour les personnages principaux ou secondaires, les personnages sont sans épaisseur, ils n'ont pas d'histoire, pas de psychologie bien définies. Par exemple, on ne sait pas grand chose des fantasmes de Frannie. On ne sait pas si son aventure avec le Malloy est un fantasme, un comportement normal chez elle ou autre. De même pour Malloy, on ne sait pas si c'est un chaud lapin, une fleur bleue etc. Cette abscence de psychologie sommaire rend les passages érotiques (rassurez-vous c'est plus tiède que chaud) absolument ridicules. En effet, ne sachant rien des personnages, il est impossible d'une part de se projeter et d'autre part d'imaginer ce que cela signifie pour eux. La cerise sur le gâteau est la conclusion qui est à proprement parler risible.
A moins que vous ne soyez un fan inconditionnel de Meg Ryan et que votre rêve le plus fou soit de la voir dévêtue je vous déconseille ce film dont le seul effet sur votre organisme sera, j'en suis sûr, un décrochement involontaire mais irrépressible de la machoire.