9/10idiots et des anges (Des)

/ Critique - écrit par Luz et riffhifi, le 19/01/2009
Notre verdict : 9/10 - Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages (Fiche technique)

BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON ! BILL PLYMPTON !

Après Hair High en 2004, dessin animé comptant au doublage un palmarès de voix connues (entre autres : David Carradine, Justin Long, Dermot Mulroney et surtout Matt Groening, créateur des Simpson et fan avoué de Bill Plympton) mais n'ayant pas apporté à son auteur la reconnaissance attendue, voilà que sort sur nos écrans Des idiots et des anges. Cette fois le budget est trois fois moindre, et la distribution est nettement moins large : à ce jour, il n'est sorti qu'en France ! L'occasion pour Plympton de se consacrer à un récit plus intimiste et d'opter pour une absence de dialogue qui apparaît comme un doigt d'honneur à l'attention de l'échec de son précédent film.

Le complexe d'e-car
Le complexe d'e-car
Le héros est le genre de gars qui n'aime pas les oiseaux le matin, qui ne blaire pas qu'on lui pique sa place de stationnement, qui ne s'émeut pas de la vue d'un papillon et qui se permet les familiarités les plus déplacées sur la serveuse du bar qu'il fréquente tous les jours. Lorsqu'il réalise qu'une paire d'ailes est en train de lui pousser dans le dos, il repousse avec la dernière énergie cette marque extérieure de pureté qui risque de le faire basculer du statut d'idiot à celui d'ange...

Si le monde de Bill Plympton vous est encore inconnu, ce dernier opus constitue une belle porte d'entrée : le mutisme hérité de ses courts métrages est si approprié au dessin qu'on se demande comment ses autres films pouvaient fonctionner avec des dialogues, et le scénario est à la fois un réservoir à idées biscornues et une fable à la lisibilité plus grande que le foutraque L'impitoyable lune de miel. Un trait marqué par la patte du dessinateur, bien particulier, des ombres par milliers, des perspectives troublantes, sur lesquels il semble jouer avec beaucoup de talent, laissant apparaître tour à tour des vues de mains géantes, de têtes faisant trois fois la taille du corps, et d'autres fois des corps tout à fait bon anatomiquement parlant, dans un style marquant l'intention et non le réalisme. Forçant les traits des personnages, il les rend parfois méconnaissables sans pour autant nuire à la clarté de la narration.

Un monde sinistre, sans couleur, où les idiots semblent se multiplier et les anges disparaitre. Un monde dans lequel le bien a du mal à survivre, à être admis, et où son apparition n'apporte nul remord, mais plutôt des envies, des idées de Des anges ou des saints animés ?
Des anges ou des saints animés ?
richesse. Peut-on domestiquer une paire d'ailes qui tente de vous ramener dans le droit chemin ? Le postulat renverse les conditions de la plupart des films d'horreur : ici, le bien éclot dans le mal, et gangrène le personnage malgré lui. Une pirouette assumée par Bill Plympton, qui cherche moins à faire passer un message qu'à aligner les scènes fantaisistes qui lui tiennent à cœur, racontées à l'aide de transitions imaginatives, poétiques et réservées exclusivement au support dessiné. Moins frénétique et cruel que L'impitoyable lune de miel ou Les mutants de l'espace, Des idiots et des anges reste un mélange de poésie et de délire, illustré cette fois par une bande-originale hétéroclite où se culbutent la voix lancinante de Nicole Renaud et le timbre rocailleux de Tom Waits, qui voisinent l'entrain de musiques europorientales à la Kusturica.

Un petit regret tout de même : le happy end décidé par l'auteur pour conclure son dessin animé. A croire qu'on s'habitue très bien aux vices divers des personnages, et à leurs luttes acharnées et burlesques entre le mal et le bien, bien plus facilement qu'à la victoire de l'un des deux partis. Espérons en tous cas que la prochaine livraison de Plympton ne se fera pas attendre plus longtemps que nécessaire. Le bonhomme se coltine tout de même la plupart des dessins tout seul à la paluche, ce qui en soi mérite déjà une médaille. Alors comme en plus c'est un génie...