4/10I'm Still Here

/ Critique - écrit par enihprom, le 20/07/2011
Notre verdict : 4/10 - Beaucoup de bruit pour rien (Fiche technique)

Tags : phoenix still here joaquin affleck film casey

I'm Still Here est sorti le 13 juillet dernier dans les salles obscures françaises, soit quasiment dix mois après sa diffusion américaine. Précédé d'une réputation sulfureuse, le film de Casey Affleck met en scène la déchéance de Joaquin Phoenix, reconverti pour l'occasion en star ratée du rap. Vrai-faux documentaire laborieux, I'm Still Here n'est finalement qu'un film mineur qui ne fera pas date dans l'histoire du cinéma, se fourvoyant dans un trip égocentrique hypocrite.

I'm Still Here
DR.Si vous êtes coutumiers de l’actualité cinématographique, I’m Still Here doit vous dire quelque chose, même vaguement. En effet, le film, réalisé par Casey Affleck (le petit frère de Ben Affleck), a fait couler énormément d’encre à cause de son principal acteur, Joaquin Phoenix. Le 28 octobre 2008, il annonce à la télévision qu’il décide de mettre fin à sa carrière dans le cinéma pour se dévouer entièrement à son autre passion, la musique. Tout le monde était un peu étonné, si ce n’est sous le choc, en apprenant le retrait d’un si talentueux acteur du monde du cinéma. Plus le temps avançait et plus l’idée de le revoir devant la caméra paraissait impossible, The Hollywood Reporter publiant même un article sur un prochain album qui serait produit par Puff Daddy en personne. Sauf que le 10 septembre 2010 sort sur les écrans I’m Still Here : The Lost Year of Joaquin Phoenix, un documentaire relatant la percée de l’acteur dans le show-business musical, le montrant dans un piteux état physique. Le public ne savait pas trop ce qu’il fallait en penser, partagé entre la vérité ou la fiction. Quelques jours plus tard, Joaquin Phoenix et Casey Affleck (accessoirement son beau-frère) vendent la mèche : tout ceci était planifié de A à Z. Immédiatement, le buzz s’installe et I’m Still Here devient LE film à voir…

I'm Still Here
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Quand on a la prétention de tromper son monde en réalisant un vrai-faux documentaire, la moindre des choses, c’est de faire en sorte que le mensonge narré soit crédible et que n’importe quelle personne puisse y croire, ce que ne propose pas I’m Still Here. Alors certes, cela peut paraître bien facile de le déclarer à l’heure actuelle, quand la vérité est connue de tous, mais en toute honnêteté, dès le début, on devine que nous avons devant nous un canular de piètre envergure. Tous les clichés possibles et imaginables sont utilisés pour montrer la déchéance artistique de Joaquin Phoenix à l’écran, de son langage devenu subitement outrancier à son apparence physique « clochardesque ». On se demande encore comment une personne qui dispose de toutes ses facultés intellectuelles a pu tomber dans le panneau tant la supercherie se voyait à des kilomètres à la ronde. Après ce constat, qui arrive au bout d'une vingtaine de minutes, I’m Still Here n’est plus le documenteur qu’il se prétendait être, mais plutôt une démonstration du talent de Joaquin Phoenix. Ni plus, ni moins.

I'm Still Here
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Et heureusement que Joaquin Phoenix a le talent nécessaire pour sauver du naufrage la production. Décuplant ses capacités d'acteur pour se mettre dans son personnage de star déchue broyée par les médias, notamment la presse people, l’acteur et le réalisateur se posent pourtant les bonnes questions et tentent d’y donner des réponses, en particulier sur le mal que peut apporter la perversité médiatique. Si l’acte est noble en soi, le procédé est légèrement hypocrite du fait que I’m Still Here utilise également le déchaînement médiatique pour faire sa publicité. Quoi qu’il en soit, c’est assez réussi dans l’ensemble puisque même en sachant que tout ceci n’est qu’une supercherie, certaines scènes nous mettent réellement mal à l’aise de par notre voyeurisme, spécialement lorsque JP (comme on doit l’appeler) se poudre le nez ou s’amuse avec des prostituées.

I'm Still Here
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Mais au final, rien y fait, I’m Still Here ressemble bien plus à une private joke qu’à un film voulant véritablement dénoncer les dérives du star-system. Se prenant pour des Dieux apportant la connaissance aux petits spectateurs que nous sommes sur les coulisses hollywoodiennes, Casey Affleck et Joaquin Phoenix se fourvoient totalement en proposant un vrai-faux documentaire débordant d’arrogance. Au lieu d’opter pour une mise en scène simple et efficace type Michael Moore, les deux compères étaient persuadés que leurs seuls talents respectifs suffiraient largement à berner tout le monde. Alors peut-être qu’une fois arrivé à un certain stade de célébrité, on devient aussi antipathique que l’est Joaquin Phoenix version rappeur (quoi qu’il n’y a pas besoin d’être célèbre pour être détestable), mais l’usage grotesque de clichés décrédibilise tout l’ensemble. I’m Still Here est donc réservé uniquement aux inconditionnels de Joaquin Phoenix – qui confirme encore une fois qu’il est un acteur débordant de talent -, et ceux qui veulent voir le film en espérant se retrouver face à un chef-d’œuvre peuvent d’ores et déjà oublier. Il y a bien mieux ailleurs.