7.5/10Harry Brown : critique vidéo

/ Critique - écrit par riffhifi, le 10/01/2011
Notre verdict : 7.5/10 - Caine le survivant (Fiche technique)

Tags : film harry brown cinema caine michael critique

Mercredi, Michael Caine reviendra dans les salles pour tenir le premier rôle de Harry Brown (attendu en France depuis plus d'un an). Critique en images.

Harry Brown est le premier long métrage du réalisateur Daniel Barber, après un court métrage appelé The Tonto Woman, adapté du romancier Elmore Leonard. Traitant du sujet préoccupant mais galvaudé de l'insécurité, il bénéficie essentiellement de la présence d'un acteur d'exception.

Le distingué Sir Michael Caine, à 76 ans, hérite ici d'un rôle comparable à celui que Clint Eastwood s'est offert il y a deux ans dans Gran Torino : papy dur-à-cuire et solitaire, Harry Brown est un ancien marine dont le passé de tueur a été remisé au rayon des souvenirs bannis. Sa fille est morte jeune, et sa femme vient de la rejoindre. Lorsqu'il apprend que son vieil ami Leonard a été la victime d'un gang local, Harry pète les plombs et sort les armes. A première vue, le scénario renvoie aux classiques du film de vengeance, comme la série des Death Wish avec Charles Bronson. Pourtant, les auteurs et Michael Caine se défendent de faire l'apologie de l'autodéfense. Ils cherchent plutôt à explorer les raisons du malaise social, les dysfonctionnements qui mènent à la criminalité juvénile... Mais au bout du compte, le film fonctionne surtout au premier degré : après une première partie aux accents dramatiques et au rythme mesuré, l'action s'emballe, Caine joue les justiciers et braque les dealers. A travers un raccourci un peu facile, on aimerait alors nous faire croire que flinguer quelques têtes est suffisant pour éradiquer la criminalité, ce qui est d'autant plus douteux que l'ambiance installée se veut assez réaliste. Les images reflètent la grisaille des coins les plus glauques de Londres, et la photographie fait un usage copieux du contre-jour et du clair-obscur pour insister sur l'aspect sinistre des décors.

Le sentiment d'oppression, le caractère inexorable des destins rappelle le récent thriller de Ben Affleck, The Town, qui se consacrait pour sa part au point de vue d'une bande de braqueurs. Certaines scènes des deux films se ressemblent même de façon frappante. De son côté, en ancien soldat soudain réinvesti de ses instincts d'antan, Harry Brown rappelle, toute proportion gardée, le personnage de Rambo. La violence de la ville réveille les instincts du tueur, et il devient difficile de savoir qui blâmer le plus. Le film se déroule dans le quartier d'Elephant & Castle, où Michael Caine a passé sa jeunesse, et l'acteur possède lui aussi une expérience militaire marquante. Le retrouver dans un premier rôle est un véritable plaisir, après l'avoir vu se cantonner à de trop courtes prestations dans les films de Christopher Nolan ces dernières années. Son interprétation subtile et puissante est incontestablement un des points forts du film. Emily Mortimer, en revanche, écope d'un rôle de fliquette compatissante assez terne, qui ne lui donne pas l'occasion de briller particulièrement. Inutile de lutter face à Michael Caine, qui tire sans peine la couverture à lui.

La réalisation, intelligente et bien rythmée, permet l'immersion progressive dans un univers de film noir crédible, où le vieillard héros ne prétend pas être resté un adepte du taekwondo à l'aide d'une doublure sournoisement placée. Les affrontements sont d'autant plus grinçants que la différence d'âge est grande, et le spectateur est amené à s'interroger sur ce qui lui est montré : chronique documentaire d'une dangerosité galopante, vision alarmiste d'une jeunesse bouc émissaire, ou simple polar nerveux mené par une vedette quasi-octogénaire ? Dans tous les cas, stress, suspense, drame et action sont efficacement entremêlés dans un spectacle de qualité.