Gremlins et autres bestioles - Dossier

/ Dossier - écrit par Lestat et riffhifi, le 15/08/2008

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Vous avez des cafards, des souris ou des lézards dans votre cuisine ? Rappelez-vous que dans les années 80 et 90, c'était pire : vous pouviez être infestés de créatures surnaturelles et vicieuses.

A partir du milieu des années 80, une ribambelle de créatures riquiquies et vicelardes envahirent les écrans : verdâtres ou marronnasses, poilues ou
visqueuses, magiques ou extraterrestres, leur seul but commun (jamais atteint) a été de reproduire le succès du Gremlins de Joe Dante, carton surprise de l'année 1984 qui vit également la consécration de l'atypique SOS fantômes. Critters, Ghoulies, Munchies se succédèrent donc dans les vidéo-clubs pour le plus grand plaisir des consommateurs de ce genre de gourmandise, qui ne profitèrent hélas de la mode que durant 10 ans, avant que les producteurs ne réalisent qu'ils étaient tous en train de se couvrir de honte...

Gremlins (1984)

Aux USA, le mot "gremlins" n'est pas inédit en 84. Issues du monde aéronautique, ces petites créatures sévissaient déjà, dit-on, durant la Seconde Guerre Mondiale, où elles étaient à l'origine d'une ribambelle de pannes inexplicables. D'ailleurs, un des premiers scripts de ce qui deviendra Alien ne mettait-il pas en scène un équipage de bombardier confronté à un représentant de l'espèce ? Roi de la littérature enfantine, Roald Dahl imaginait pour sa part en 1943 un roman sobrement intitulé Les Gremlins. On peut légitimement se demander dans quelle mesure cet incunable a inspiré le film que nous connaissons tous, lorsque l'on observe le ton méchamment drôle de l'auteur gallois. Signalons enfin un sketch du film La quatrième dimension mettant en scène un Gremlin accroché à un avion, sketch signé d'un certain... Joe Dante.

Joe Dante justement qui, alors qu'il évoluait sous l'aile de l'indéboulonnable Roger Corman, avait déjà prouvé une certaine propension à semer la pagaille. Un inconscient lui donne un lac plein d'enfants ? Il y verse une cargaison de piranhas. Diantre, Dante n'aimerait-il pas les mômes ? Ce sont au contraire, en sale gosse qu'il est resté, les conventions qui le débectent. Et dans la confiture moribonde des mélodrames de Noël, il ne pouvait donner qu'un grand coup de pied. Gremlins donc, ou l'art de L'enfer de Dante
L'enfer de Dante
parasiter un film familial comme la télé en produit au kilomètre (petite banlieue, sapins, magie, papa mort...) avec des monstres affreux, sales et méchants. Gremlins débute pourtant comme un joli conte : le jeune Billy se voit offrir un Mogwai, mystérieuse créature acquise dans la boutique d'un étrange Chinois. Baptisé Gizmo, ce compagnon doux et affectueux se doit cependant d'être canalisé par certaines règles de vie, dont le non-respect entraîne des conséquences désastreuses. Une histoire mignonne, propice à faire rêver les enfants, qui permet pourtant à Joe Dante de jouer sur deux tableaux distincts : un fantastique pur et sincère lorsque Gizmo est au centre de la scène ; une comédie horrifique insolente lorsque sa variation gremlinienne occupe le terrain. Et là il faut bien l'avouer, si le Mogwai est un animal des plus craquant, ce sont bien les Gremlins qui font l'intérêt de Gremlins (!). Il est évident que Joe Dante n'est jamais aussi heureux que quand il jette un Père Noël en pâture à ses petites abominations, leur fait mettre à sac une cuisine proprette, détraquer un monte-escalier ou chanter des cantiques en ricanant. Un inventaire de bonnes manières qui vire au sabotage délibéré et réjouissant, s'achevant pourtant sur une note douce-amère. Gizmo repart ainsi dans sa boutique, loin de l'inconscience des hommes. Malheureusement pour Joe Dante, ce n'est pas grâce à lui que nous deviendrons plus sages. Car désormais, il y aura donc toujours quelqu'un, quelque part, lorsque son mixeur sautera, pour se dire que ce ne sont pas les plombs mais un Gremlin qui fait le zouave dans les murs. Ce qui est un signe indéniable de bonne santé.

Gremlins 2 - La nouvelle génération (1990)

Cinq ans après le premier Gremlins, Joe Dante se laisse convaincre de tourner un deuxième volet : « Warner me voulait à tout prix pour cette suite car ses producteurs ne savaient pas vraiment pourquoi Gremlins avait rapporté tant d'argent. En fait, ils pensaient tous que c'était grâce à moi. » *. Il accepte donc, à condition de pouvoir changer complètement le décor et le ton de l'original. Dont acte : la petite bourgade et l'aspect horrifique laissent place au building ultra-moderne dans lequel travaillent désormais Billy et sa fiancée. Le dieu du coin s'appelle Daniel Clamp (John Glover), un illuminé mégalomaniaque enfermé au Gizmo dans le dernier rôle de sa carrière
Gizmo dans le dernier rôle de sa carrière
sommet d'une tour d'argent à la pointe de la technologie. Tellement à la pointe, d'ailleurs, que le département de recherche scientifique (dont le chef est incarné par l'irremplaçable Christopher Lee) ne résiste pas à l'envie d'étudier un petit être étrange nommé Gizmo. S'ensuit évidemment une invasion gremlinienne irrésistible, les bestioles prenant le parti de détourner systématiquement toutes les ressources à leur disposition : le laboratoire, les studios de télévision... Tout ici est prétexte à la folie destructrice la plus jubilatoire, Joe Dante multipliant les références et les clins d'œil cinématographiques de tous poils : Rambo, Les temps modernes, New York New York, Batman, Des monstres attaquent la ville, Marathon man, Le fantôme de l'Opéra... et même Gremlins, dans une auto-référence directe qui permet au film de sortir de son propre cadre, amenant au passage une scène totalement insensée durant laquelle les Gremlins interrompent la projection ! On notera d'ailleurs que cette scène diffère entre la version cinéma et la version télévisée, la première montrant Hulk Hogan s'énerver tandis que la deuxième exhume des images d'archives de John Wayne et Bugs Bunny. On se demandera malheureusement toujours à quoi pouvait bien ressembler la première version du scénario écrite par l'ex-Monty Python Terry Jones, jugée trop dingue par Warner Bros.

Après une première partie où Joe Dante brocarde avec justesse le monde de l'entreprise (ah, le coup des tableaux réalisés par des « artistes reconnus » !...), les personnages humains du film s'effacent complètement derrière leurs petits partenaires pour les laisser détruire cet environnement oppressant. On retrouve avec plaisir Monsieur Futterman (Dick Miller) et sa femme, de passage en ville au mauvais moment... Le casting inclut également John Astin, interprète de Gomez Addams dans la version 60s de La famille Addams, et Robert Picardo, inoubliable Cow-boy dans L'aventure intérieure réalisé par Joe Dante trois ans plus tôt. Dante, jamais en manque d'invités, convie aussi Chuck Jones, pape du cartoon, à réaliser les séquences du début et de la fin qui mettent en scène Daffy Duck et Bugs Bunny.

Comédie azimutée et irrévérencieuse, Gremlins 2 perd sans doute en poésie décalée ce qu'il gagne en folie barjote. Mais il montre avec brio la capacité de Joe Dante à ne pas se répéter, et fait amèrement regretter qu'un troisième épisode n'ait jamais vu le jour...

* Mad Movies n° 66 de juillet 1990

Ghoulies (1985)

Premier film à surfer sur le succès de Gremlins, Ghoulies semble avoir pris le train en route. Dans ce premier opus d'une série qui en compte désormais quatre, les bestioles que l'on nomme Ghoulies ont manifestement été ajoutées dans le
scénario (voire dans le film !) au dernier moment : l'histoire tourne autour de Jonathan, qui hérite de la maison de son père et y découvre les activités de sorcellerie exercées par ce dernier. Ignorant que la curiosité est un vilain défaut, il se lance sur les traces du papa et met ainsi en danger sa bande d'amis (jeunes et crétins, c'est une constante dans ce genre de films). Parmi eux, on aperçoit la très jeune Mariska Hargitay, revue ces dernières années dans Urgences et surtout dans la série New York Unité Spéciale.

Les Ghoulies apparaissent comme une présence purement décorative, artificiellement ajoutée au détour de quelques scènes pour pouvoir en faire l'argument principal de l'affiche. Le film n'est pas désagréable par ailleurs, pour peu qu'on ait le goût du film d'horreur fauché des années 80, mais le côté « plagiat de Gremlins » apparaîtra essentiellement dans les suites.

Ghoulies II (1987)

Charles Band, on ne la lui fait pas deux fois. Dans cet inévitable second épisode, les Ghoulies sont cette fois au centre de la scène, au point que l'histoire semble...
ajoutée dans le scénario (voire dans le film !) au dernier moment. Le postulat tient sur une feuille de papier toilette : les petits monstres mettent la pagaille dans un cirque des horreurs itinérant, menacé par un méchant homme d'affaires au brushing d'une autre galaxie. Pour le reste, nous avons la joie de voir les Ghoulies liquéfier un moustachu, électrocuter un alcoolo, égorger une blonde cruche qui, comme chacun, cherchait son chat ou encore faire subir le supplice Poe-ien du pendule à un énergumène dont l'accoutrement ne méritait de toute façon que la peine de mort. Idiotie ludique et rondement menée, Ghoulies 2 trouve son point d'orgue lors d'un final assez touchant dans sa tentative de la jouer kaiju avec une bestiole qui ne semble pas dépasser le mètre 30. Côté casting et sans transition aucune, notons la présence du comédien nain Phil Fondacaro, qui un an plus tôt offrait déjà ses services au clan Band avec Troll.

Ghoulies III (1991)

Quelqu'un, un jour, a dû tomber en pâmoison devant Ghoulies 2 et s'exclamer tout haut qu'il ne leur manquait que la parole. Ce qui n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd : des ghoulies qui parlent ? Quelle foutue bonne idée ! Et pendant qu'on y est, on va les envoyer à la fac, histoire de débattre des théories de Kant avec des
ados délurés. Ghoulies 3 est et reste un mystère : est-ce la quintessence de la comédie balourde ? Est-ce le dernier palier du navet avant de racler le fond ? Que la langue des Ghoulies ait évolué au-delà des borborygmes étaient déjà assez iconoclaste en soi, mais que dire face aux savoureuses saillies que nous assènent les intéressés ? « Oh, un gisement de slip ! », « Ragnar n'a pas de zizi » et autres soliloques du même tonneau parsèment ainsi un film qui s'enfonce dans la bêtise la plus régressive. Pas dupe, John Carl Buechler emballe le tout avec suffisamment de rythme pour faire passer le temps, s'arrêtant quelquefois pour capturer la mine béate d'une de ses créatures, admirative d'une belle paire de fesses lui passant sous le nez. C'est à se demander pourquoi Ghoulies 3 n'est pas devenu culte. La franchise aurait légitimement pu s'arrêter là, mais c'était sans compter un quatrième opus signé Jim Wynorski qu'il est humainement impossible d'avoir envie de voir. A moins que... Riffhifi ?

Ghoulies IV (1994)

Avec sa blondasse en latex, sa musique de Club Med et ses poursuites en voitures, le quatrième opus frise le hors-sujet. Pourtant, le réalisateur Jim Wynorski, à qui l'on doit de nombreux films d'horreur à forte charge érotico-racoleuse et le familial Munchie (sans réel rapport avec Munchies en-dehors d'une bestiole très mal faite),
tente désespérément d'établir le lien avec le premier Ghoulies en faisant revenir son interprète principal Peter Liapis. Son personnage est devenu flic de choc (il dézingue les braqueurs de supérette avec un flingue dans chaque main), et sert de prétexte à une succession de flash-backs du premier film, bien pratiques pour meubler le métrage. Pratique aussi pour montrer les ghoulies, parce que ceux que le réalisateur a sous la main ne sont que deux acteurs nains transpirant sous des masques rigides ; difficile pour le spectateur d'admettre que les deux créatures (dont les agissements sont aussi mystérieux qu'inoffensifs) parviennent à s'exprimer sans que leur bouche ne s'ouvre un seul instant... La punition est heureusement de courte durée, le film dure à peine 1h15 hors générique. On s'en serait quand même passé.

Critters (1986)

De tous les plagiats de Gremlins, Critters est sans doute celui qui tient le plus la route, en offrant l'univers le plus cohérent et le plus indépendant. On doit la franchise à New Line Cinema, qui faisait son beurre à l'époque avec Freddy Krueger. Rien de bien intelligent par ailleurs chez les Critters : le premier film s'ouvre sur l'évasion des Crits, hors-la-loi galactiques détenus dans une prison de haute sécurité. Deux policiers de l'espace sont envoyés à leur trousse, avec la
consigne de les ramener à n'importe quel prix. Les deux zigotos ont la faculté de modifier leur apparence, ce qui leur permet de se fondre dans leur environnement... A peine arrivés sur Terre, ils prennent respectivement la forme d'une rock star (des années 80, les meilleures) et d'un flic. Leurs seuls soutiens dans la chasse aux Crits seront Charlie, un employé de ferme un peu neuneu (Don Opper, coscénariste), et Bradley, un gamin malicieux et désobéissant (Scott Grimes, qu'on retrouvera de nombreuses années plus tard dans Urgences sous la blouse du Docteur Archie Morris).

Le plus divertissant dans Critters, outre sa musique terriblement ancrée dans l'époque et l'apparition du tout jeune Billy Zane (Titanic), est le contraste entre la « menace » représentée par les Crits, boules de poils minuscules et finalement faciles à maîtriser, et l'« aide » apportée par les deux agents de sécurité qui passent leur temps à démolir des bâtiments et à terroriser la population locale. De là à y voir une critique amusée de la répression comme moyen de préserver l'ordre, il n'y a qu'un pas...

Critters 2 (1988)

Le deuxième Critters assume plus ouvertement sa filiation avec Gremlins, dès le générique d'ouverture qui affiche une police de caractère méchamment apparentée à celle du film de Joe Dante. Le scénario est un pur prétexte, utilisant naturellement la fin du premier film comme argument pour convoquer de nouveau les chasseurs
de l'espace sur Terre. Charlie et ses compères sont de retour, bien décidés à éradiquer toute trace des Critters afin de toucher leur prime. Bradley revient lui aussi, histoire de conserver une cohérence à la saga. Quant aux bestioles, elles se propagent essentiellement par la faute de la bêtise et de la cupidité des hommes, qui cherchent à exploiter les œufs trouvés dans le premier film. Là encore, on pense à Gremlins et aux comportements irresponsables et superficiels qui mènent au déchaînement des forces du mal. Le reste est prévisible mais sympathique : espièglerie des bestioles, massacres en série par les chasseurs, transformation régulière de Zanti en fonction des gens qu'il croise (une photo de pin-up, un binoclard neuneu)... Le tout est réalisé avec savoir-faire par Mick Garris, qui se spécialisera par la suite en adaptations de livres de Stephen King pour la télévision : Sleepwalkers (1992), Le fléau (1994), Shining (1997), Quicksilver Highway (1997), Riding the Bullet (2004) et Desperation (2006).

Critters 3 (1990)

Et c'est reparti ! Après l'excellent Critters 2, les bouboules de poils reprennent du service dans un épisode routinier où l'on se glisse comme dans de vieilles pantoufles : petit patelin rural, personnages vite esquissés, manichéisme propre et net, humour gras du bide, méchanceté de bon aloi, tout est là. Capitalisant sur la
formule de Critters 2, le sens du rythme en moins, Critters 3 se concentre donc sur l'attraction principale de la saga : ses si attachants petits monstres, qui pour le coup n'ont jamais autant ressemblé aux Gremlins, intellectuellement parlant. Ainsi cette scène où les Crits font les andouilles dans une cuisine, qui à quelques gaz intestinaux près, renvoie directement au film de Joe Dante. On remarquera en sus que la réalisatrice Kristine Peterson (Kickboxer 5, ouah !) exerce son art d'une manière justement très "dantienne", certaines scènes semblant sortir simultanément de Hurlements et de Piranhas. Sans génie mais sans défaut, Critters 3 est donc une attachante petite surprise. Plaisir supplémentaire, Charlie est de retour, via une apparition tonitruante dans la première bobine. Moins marquante, signalons celle de Leonardo DiCaprio qui, en short et chaussettes, mangeait là son pain noir en attendant de rencontrer Cameron et Scorsese.

Critters 4 - L'invasion (1991)

Toute bonne série des années 80 se doit d'avoir son épisode dans l'espace. Dans Critters 4, les Crits, déclarés espèces protégées (!) suite aux péripéties du troisième opus, devancent donc l'ami Jason et se voient donner l'occasion de retourner au bercail. Evidemment, le voyage se passe mal et ouf, voila un sujet de
scénario, ne reste qu'à trouver une pirouette pour faire revenir Hugues et le véritable héros de la saga, ce bon vieux Charlie. Sans se départir de leur bonne humeur, les p'tites boules se compromettent ici dans un improbable film de SF tourné dans trois couloirs, qui réussit l'exploit d'évoquer Alien Resurrection avec cinq ans d'avance : nous trouvons ainsi des pirates de l'espace, des caissons mystérieux et une bases spatiale infestées de monstres, sans oublier Brad Dourif, présent au générique des deux oeuvres. De là à dire que Joss Whedon est un fan de Critters 4... Quitte à assister au pillage d'Alien, on aurait aimé voir des extraterrestres pleins de dents poursuivre des cohortes de nymphettes en slips, malheureusement nous revenons ici aux sources du premier opus : bestioles au second plan, personnages verbeux et quota de tueries bien maigrichon. Si Critters 4 se regarde d'un oeil torve, il n'en est pas désagréable pour autant. Plutôt bien réalisé, il récompensera en outre les spectateurs qui n'ont pas quitté la barque en route avec un final surprenant, où Charlie nous la joue cow-boy vengeur. Une petite chose attachante au bout de compte, qui ravira essentiellement les complétistes de la série traumatisés par le cliffhanger de l'épisode 3.

Troll (1986)

Troll est un bien étrange film. Pour le découvrir, il faut se faire violence et supporter une entrée en matière pénible pour les zygomatiques, où l'on nous présente, dans un ahurissant concert de portes qui claquent, des personnages plus gratinés les
uns que les autres. Il faut aussi tolérer la présence d'un jeune héros nommé Harry Potter, ce qui dans le contexte littéraire actuel ne manque pas de saveur. Passé ces détails, cette petite production Charles Band se révèle sérieuse et soignée, assumant pleinement son concept farfelu : le film de Fantasy en HLM. Assurant la mise en scène et les effets spéciaux, le maquilleur John Carl Buechler signe un film assez féérique, traversé de fulgurances oniriques du plus bel effet bien qu'un tantinet opportunistes (Legend sortait un an plus tôt). Sorte de relecture urbaine du conte de fée, Troll séduit par son propos naïf et ses créatures de toute beauté, où l'on retrouve une sorte de Ghoulies (un des faits d'arme de Buechler) et un cousin lilliputien de l'Etrange Créature du Lac Noir. Des petits monstres d'ailleurs tellement attachants que le propos du film en devient flou. Un dernier acte gentiment lovecraftien viendra cependant remettre les choses dans le bon ordre. Qu'il amuse volontairement ou non, Troll est un bien sympathique moment, rendu encore plus charmant par le voile des années.

Troll 2 (1992)

Dès le générique, ça sent le roussi : mise en scène de Drake Floyd, costumes de Laura Gemser. Si la présence d'une icône du cinéma dénudée au rang d'habilleuse ne manque pas d'étonner, le nom de Drake Floyd fait plutôt frémir, puisque sous ce pseudo impayable se cache cette canaille de Claudio Fragasso. D'emblée, la
messe a au moins le mérite d'être dite et la suite nous le confirmera : Troll 2 est un gros nanar bien baveux, consternant de bout en bout, dont on ne sauvera qu'une certaine noirceur symptomatique du cinéma d'horreur italien. Un brin confus, le scénario fait abstraction du premier épisode et nous apprend que les Trolls sont furieusement végétariens mais aiment bien s'attaquer aux humains, qu'ils transforment donc en plante via une substance verdâtre pour les consommer. De là, le film met en scène un insupportable jeune garçon qui aura fort à faire pour ne pas que sa famille se voie transformée en salade. Les effets spéciaux, plus du tout signés John Carl Buechler, sont à se tordre de rire, les Trolls ont gagné 50 cm d'un film à l'autre, les acteurs sont plus mauvais les uns que les autres (ceux qui ne sont pas inexpressifs battent des records de cabotinage) et le dénouement est à la hauteur de l'ensemble, le gamin parvenant à repousser les monstres avec un hamburger. Ce même gosse qui plus tôt dans le film urinait sur la table en plein repas de famille pour éviter que les siens n'ingurgitent la potion maléfique. Troll 2 laisse pantois : Claudio Fragasso donnerait-il dans la parodie ? C'est mal connaître ce disciple de Bruno Mattei, qui souffrait sûrement davantage d'un poil dans la main, cultivé, à sa décharge, par un cinéma de genre transalpin en pleine débâcle.

Munchies (1987)

Avec ses bestioles au nom de biscuit apéritif, Munchies est de loin le plagiat le plus éhonté de Gremlins, produit par le spécialiste du genre Roger Corman. Un juste retour des choses puisque Joe Dante est un ancien poulain de Corman... De toute façon, le film affiche la couleur sans complexe : la musique est un pompage en
règle de celle de Jerry Goldsmith, le premier Munchie s'exprime avec l'exacte même voix que Gizmo... on y voit même un journal qui titre en première page « GREMLIN ». Corman, c'est le gars qui se gratte pas trop avec la notion de propriété intellectuelle. Dans cette version, les Munchies se reproduisent lorsqu'ils sont coupés en petits morceaux. On vous entend d'ici : « on est tranquilles, les Munchies qui se font couper en petits morceaux ça ne doit pas arriver tous les jours... » Et bien détrompez-vous, l'évènement se produit pas moins de 3 fois en 83 minutes de métrage... Les acteurs surjouent à en friser l'apoplexie, les effets spéciaux font pitié et les décors sont trop dépouillés pour que leur aspect multicolore puisse sauver en quoi que ce soit le résultat du naufrage. C'est du nanar fauché comme on en voit dans les musées du nanar, avec ses poupées inertes en guise de bestioles et son mixage pathétique qui tente de faire croire que lesdites poupées s'expriment avec des voix de gros blacks de Harlem... Bref, c'est du lourd. On notera la présence de Robert Picardo sous une grosse moustache et une paire de lunettes, dont il se débarrassera trois ans plus tard pour... Gremlins 2 !

Hobgoblins (1988)

Hobgoblins est un cas à part, pas seulement dans l'histoire des plagiats de Gremlins, mais surtout dans l'histoire du cinéma. Peut-être même dans l'Histoire du monde, avec un grand H. Souvent classé dans la liste des plus mauvais films à avoir vu le jour, il défie toutes les lois du bon sens en devenant au cours des années un film culte, dont la suite est prévue pour cette année, suivant la mode des suites tardives actuellement en vogue. 20 ans après, Hobgoblins 2 est donc sur le point de sortir (directement en vidéo, faut pas déconner non plus). La popularité du film est due en partie à sa diffusion dans l'émission Mystery Science Theater 3000 (MST3K), où des robots commentent des nanars en y insérant des répliques à la
con, façon Rocky Horror Picture Show.

En gros, il s'agit d'un sidérant morceau de non-cinéma, tourné avec les pieds par un réalisateur-producteur sans le sou du nom de Rick Sloane, réduit à utiliser les mêmes décors pour figurer plusieurs lieux. La pauvreté crasse de l'intrigue oblige le malheureux réalisateur (en même temps c'est de sa faute, il est également scénariste) à meubler à l'aide de scènes interminables comme la baston à coups de râteau ou la scène au Club Scum (la boîte branchée du coin, fréquentée par... huit personnes !), dont la longueur a failli rendre fous les critiques de cinéma obligés de regarder le film en entier. On ne se rend pas compte à quel point 88 minutes peuvent être pénibles parfois. Quant aux Hobgoblins, il s'agit d'extraterrestres arrivés sur un terre dans un pot de yaourt (ils y rentrent à deux avec un chausse-pied) pour une raison obscure. Contrairement à leurs confrères, ils ne sont pas interprétés par des marionnettes mais par... des peluches. Lorsque les personnages sont agressés par les bestioles, elles se prennent donc simplement une peluche dans la tronche, et se débattent tant qu'elles peuvent avec. Triste. De 1988 à aujourd'hui, la carrière de Rick Sloane a consisté à réaliser les comédies érotiques Vice Academy 1, 2, 3, 4, 5 et 6. Comme Rodin, certains artistes ne peuvent espérer être reconnus qu'après leur mort... Que certains souhaitent prochaine... (sauf riffhifi et moi, qui voulons voir Vice Academy 7 - NdLestat)


Tant qu'il y aura des monstres...

Lutins, gnomes, farfadets... ils font partie de notre imaginaire, parfois de notre patrimoine. Joe Dante, par la savoureuse conclusion de son Gremlins, film par ailleurs vide de toute explication superflue, est peut-être le seul à avoir rendu hommage à cet univers de mythe et de légende. C'est sans doute grâce à cette naïveté apparente, faisant appel aux rêves et peurs de l'enfance que Gremlins est devenu un classique. Le seul véritable, pour ainsi dire, des titres cités ici, dont il n'y a finalement que Troll à avoir réitéré l'esprit. Aujourd'hui, le genre des films à petites bestioles semble s'être endormi, malgré une petite résistance dans le marché du DVD (Bloodgnome). En guise de vestiges d'époque, on aura une pensée émue pour le merchandising saugrenu qui a secoué la France des années 80, prise dans une minivague de produits allant du plus respectable (l'indispensable peluche Gizmo !) au moins défendable (l'horrible collection Boglins et ses marionnettes en caoutchouc qui pue). En menant une certaine réflexion, nous pouvons dire enfin que sans Ghoulies dans les toilettes, Critters rouleboulant dans les rues et Gremlins dans les maisons... oh mais qu'est-ce que ??é^ù; az²124 R1AR 1ZZA------* POUITCH*!:;

Gnihihihihi