6.5/10Eldorado

/ Critique - écrit par nazonfly, le 03/07/2008
Notre verdict : 6.5/10 - Mieux que Julien Doré (Fiche technique)

Tags : eldorado lille histoire film vie infos lieu

Deux paumés entament un road movie initiatique à travers la Belgique, à la découverte d'eux-mêmes. Un film presque excellent.

Le road movie est un genre cinématographique bien particulier dans lequel la route devient, à la fois, le cadre et le sujet d'un film. L'histoire du cinéma regorge de road movies : de Easy Rider à Thelma et Louise, de Point limite zéro à Little Miss Sunshine. En général, on imagine facilement le road movie américain, dans un pays construit autour des routes et où des kilomètres de ligne droite s'enfoncent dans le désert. Hit the road Jack !

Un voyage... initiatique

En voiture Simone !
En voiture Simone !
Oublions ici l'immensité du pays de l'Oncle Sam, oublions le désert et les ciels d'un bleu profond, oublions aussi les grosses cylindrées qui vrombissent sur l'asphalte. Ici c'est la Belgique qui est à l'honneur, le gris habituel du ciel se reflète dans la vie des gens, leur donnant à la fois un charme triste et un humour grinçant. Eldorado est l'histoire d'un road movie de deux paumés qui se rencontrent au détour d'un cambriolage. Yvan, joué par Bouli Lanners est un vendeur de voitures américaines, un véritable ours, barbu et mal léché mais au coeur forcément d'or. C'est en rentrant chez lui, un soir, qu'il découvre Elie, un junky cambrioleur raté en train de se cacher sous le lit. Une étrange relation se noue entre les deux hommes qui partent sur les routes belges à la recherche des parents d'Elie.
Au cours de cet étonnant voyage qu'il est facile de qualifier d'initiatique, Yvan et Elie rencontreront des personnages haut en couleur (dont un surprenant Alain Delon) et se mettront petit à petit à nu.

Des sentiments, des rencontres et une leçon de vie

Méthode pour ne pas s'endormir au volant
Méthode pour ne pas s'endormir au volant
Rien de franchement original dans ce synopsis. Deux hommes en voiture qui se découvrent petit à petit, au fil des rencontres... Deux hommes que tout oppose, pourrait-on oser d'écrire si l'on ne tombait pas dans un cliché habituel des buddy movie. Entre le frustre qui se découvre un coeur et le junky qui a besoin d'amitié se joue une leçon de vie et d'humanité avec quelques scènes superbement bien senties, parce que sorties de l'expérience de Bouli Lanners. Comment ne pas trouver magnifique ces deux hommes bêchant le jardin d'une mère trop vieille pour le faire ? Evidemment cette leçon nous a été servie maintes et maintes fois, mais une fois de plus, elle parvient (ou presque) à toucher le spectateur.
Les rencontres que feront les deux acolytes seront à la fois l'occasion de prolonger cette expérience de vie et d'offrir quelques scènes parfois absurdes, parfois hilarantes, parfois tristes. Comme la vie. Chaque personnage secondaire est un bijou dans un écrin sobre, comme on en rencontre de plus en plus au cinéma. Un collectionneur de voitures cabossées, un motard au coeur brisé, un chien miraculé. Cette galerie de tronches chassées rappelle immédiatement des films comme Cowboy, J'ai toujours rêvé d'être un gangster (les deux déjà avec Bouli Lanners) ou ceux de Benoît Délépine Aaltra et Avida. Bizarrement que des films tournés dans le Nord ou la Belgique.

Un road movie belge 

Mais si, c'est sympa la Belgique
Mais si, c'est sympa la Belgique
Pourtant la Belgique qui sert de décor à Eldorado ressemble presque plus aux Etats-Unis qu'au plat pays de Brel. La pluie, qu'on imagine y tomber à longueur d'année en général, y est quasiment absente si ce n'est sous forme d'orage. Les rivières s'écoulent au milieu des montagnes et des forêts. Jusqu'à cette scène où Yvan et Elie sont dans une caravane, au milieu d'une clairière qui, coïncidence ou pas, fait un lien intéressant avec Into the wild. Sans doute est-ce le format Scope qui donne toute cette largeur et cette lumière habituellement propre aux films étatsuniens.
Mais cet aspect visuel est sans cesse contrasté par un fond européen, si on peut dire, qui laisse le temps au silence, aux non-dits et qui se joue dans un rythme lent et décalé. Ce dernier point, à dire vrai, est certainement l'aspect le moins réussi du film. Malgré le court format (1h25), Eldorado se découvre presque ennuyeux, voire inintéressant, pas vraiment aidé par une histoire dans laquelle il est difficile d'entrer et qu'on ne parvient à croire.

Eldorado manque de peu son but. Pas assez touchant, pas assez absurde, pas assez tourné vers la réflexion, il n'est pourtant pas raté mais il lui manque cette étincelle, ce petit détail qui aurait pu le rendre exceptionnel. On attendra cependant les prochains films de Lanners avec impatience.