6/10L'effet papillon

/ Critique - écrit par Kassad, le 18/03/2004
Notre verdict : 6/10 - Vol au dessus d'un nid de papillons (Fiche technique)

L'effet Papillon c'est cette vulgarisation si populaire de la physique du chaos. L'idée est que dans un système instable la moindre modification des conditions initiales peut déboucher sur des résultats sans commune mesure avec leur importance d'origine. Ainsi le battement d'une aile de papillon dans une forêt française pourrait être à l'origine d'un typhon en asie six mois plus tard. L'image est jolie et réussit le tour de force de transformer un domaine rébarbatif (l'étude des systèmes d'équations non linéaires) en une féérie romantique. L'effet papillon n'a rien d'un film romantique. Ce film est basé sur une idée maintes fois utilisée, en l'occurrence comment la modification du passée influence-t-elle le présent. Je citerais par exemple la trilogie des retour vers le futur (pour la version ado/science-fiction/humour), le dernier souper (pour la version politico-morale), sliders (pour la version série-télé-du-samedi-soir-sur-M6), la part de l'autre(pour la version philosoco-mystique), Muse avec la piste Butterflies & Hurricanes d'Absolution (pour la version musicale) etc. On pourrait donc croire le filon exploité jusque dans ses derniers recoins. Pourtant je dois avouer avoir été surpris par ce film.

Evan est un enfant au comportement étrange. D'ordinaire sage comme une image il peut d'un instant à l'autre se retrouver avec un couteau de cuisine dans les mains (et quand on a un père qui s'appelle Jason ça peut suffire à rendre suspicieux) ou bien se dessiner comme un meurtrier sanguinaire... L'ennui est que de ces moments d'émotions fortes, il ne lui reste rien. Le petit Evan a des trous de mémoires. Pour y pallier un médecin lui conseille de tenir un journal intime où il raconte dans le détail les événements de la journée. Ce journal ne lui permet pas que de se remémorer son passé il lui permet aussi de le modifier, pour le meilleur comme pour le pire même si le meilleur reste toujours à venir (air connu)...

Le film oscille entre plusieurs genres : fantastique (pour la magie qui permet de modifier le passé), psychologique voire psychiatrique (une lecture du film est de penser qu'Evan est fou et se construit des passés de rechange pour gommer sa culpabilité), horreur (certaines scènes m'ont surpris au sens où elles m'ont fait sursauter et d'autres sont vraiment effrayantes), certains passages tiennent même de la comédie sentimentale... Bref ce film est difficile à classer. C'est un de ses atouts, souvent on se retrouve dérouté par le cours des événements et ce n'est pas désagréable de se retrouver pris dans un scénario qui échappe un peu au prévisible. En effet, même si de manière générale on sent bien que ce qui va arriver ne sera pas vraiment amusant, le ton détonne avec ceux de la production actuelle standard. Il y a une noirceur et un sentiment de malédiction impressionants qui se dégagent d'Evan.

La philosophie du film est, en étant indulgent, légère et peut se résumer en un lapidaire: "hé les mecs, faites pas les cons avec un pouvoir qui vous dépasse". Bref, une fois de plus on a encore droit à une n-ième resucée du mythe de l'apprenti sorcier. C'est la principale limite que je trouve à ce film : il reste trop enfermé dans les codes du genre pour le révolutionner mais mérite le détour. C'est en effet un des rares films de ces dernières années m'ayant effrayé et surpris dans son déroulement (même si une fois la prise de recul faite, il n'y a pas grand chose de nouveau sous le soleil), et autre remarque curieuse durant la projection je me suis trouvé projeté dans une autre dimension où le temps s'écoulait plus lentement. Notamment la première partie qui m'a paru, et ce n'est pas péjoratif, beaucoup plus longue que sa durée réelle. Un peu comme si mon cerveau était passé en mode turbo...