La chute
Cinéma / Critique - écrit par Vincent.L, le 07/01/2005 (La Chute
La fiction historique La Chute relate les derniers jours de la vie d'Hitler et la fin du IIIème Reich. Il est porté à l'écran par Oliver Hirschbiegel (le réalisateur de l'inoubliable L'Expérience) qui s'appuie sur un scénario de Bernd Eichinger et sur les livres de Joachim Fest, Melissa Müller et de la secrétaire d'Hitler Traudl Junge. Les faits du film se déroulent à Berlin du 20 avril 1945, date du dernier anniversaire du Führer, au 2 mai 1945.
On retrouve dans ce long métrage les protagonistes les plus importants du troisième Reich comme le ministre de la propagande Goebbels, le chef des SS Himmler, l'architecte puis ministre de l'armement du régime nazi Speer, les généraux Burgdorf, Krebs, Weidling, Keitel et Yodl, l'amante puis femme d'Hitler Ewa Braun, la secrétaire d'Hitler Traudl Junge...
La Chute s'intéresse à la Seconde Guerre Mondiale vue du côté des allemands, et ceci au delà de l'entourage d'Hitler, c'est-à-dire que le film expose aussi les conséquences de la perte du régime nazi sur le peuple allemand.
Tout d'abord, ce film ne serait rien sans son acteur principal, Bruno Ganz, qui incarne Hitler avec une force incroyable. En effet ses intonations d'énervement et de fureur, la dureté de ces paroles contre les juifs qui nous rappellent le génocide et sa façon générale de se comporter sont criantes de vérité.
Oliver Hirschbiegel a choisi de montrer qu'Hitler était un homme, avec des sentiments pour ses proches et qui pouvait pleurer comme par exemple après la trahison de Himmler. Ceci au risque que certains éprouvent de la sympathie et de la compassion envers le personnage. Le réalisateur estime que montrer Hitler comme un humain est d'autant plus puissant qu'on se rend compte de la barbarie dont un humain a été capable. Sans rappeler visuellement les horreurs commises par Hitler contre les juifs, le film évoque souvent, à travers des paroles que le Führer prononce, des discours sur sa vision des juifs, des hommes en général et du monde, des actes qui resteront gravés longtemps dans la mémoire collective. La scène de la sélection de sa secrétaire résume par exemple ironiquement assez bien le personnage et sa vision.
L'histoire est celle que l'on connait : fin avril 1945, les Russes, avec des moyens et des effectifs titanesques, attaquent et encerclent Berlin pour faire tomber le régime du troisième Reich, installant le doute au sein même du gouvernement; Hitler, retranché dans son Bunker jouxtant la chancellerie, ne supportant pas sa défaite, aussi bien guerrière qu'idéologique, refuse de capituler; il cherche en vain, avec peu de soutiens et en se contredisant des tactiques pour tenter de contrer l'offensive soviétique avant de se suicider début mai.
Une quantité de moments forts découlent de cette histoire. Toutes les scènes où Hitler s'énerve donnent de véritables frissons. Les souffrances, les blessés et les morts d'un peuple allemand laissé à l'abandon par Hitler, qui avait refusé de faire évacuer les berlinois, ont de quoi émouvoir. La guerre est effroyable, terrassant par centaines les civils allemands, entassant dans les hôpitaux les corps déchiquetés...
Le point le plus intense du film est certainement l'amour, l'admiration et l'attachement qu'avaient certains allemands pour leur chef Hitler. On pense ainsi à toutes ces personnes, Ewa Braun, les Goebbels mais aussi des civils qui se sont suicidés car ils n'acceptaient pas de vivre dans un monde sans national socialisme. C'est avec ça qu'on comprend mieux l'histoire, que l'on se rend compte que si Hitler a pu faire tous les massacres qu'il a fait, c'est parce que des milliers de personnes étaient fascinées par lui, sans forcément comprendre et savoir ce qu'il ordonnait et ce qu'il voulait réaliser.
Ce dernier point, qui transparaît avec la secrétaire Traudl Jung est d'ailleurs à la fois ce qui ouvre et clôture le film. C'est-à-dire qu'au même titre probablement que de nombreux autres allemands, Traudl Jung n'avait pas vraiment l'impression qu'Hitler était un mauvais homme, elle était partagée entre la peur et le doute vis-à-vis d'un homme au charisme impressionnant et aux conséquences abominables qu'elle ne comprenait pas, n'en ayant qu'une vision lointaine.
Côté purement cinématographique, on regrettera la prestation d'Alexandra Maria Lara, Traudl Jung dans le film, qui est en perpétuel décalage par rapport à ce qu'elle aurait dû jouer et par rapport au talent général de tous les autres acteurs (Bruno Ganz et Ulrich Matthes en tête). De plus, et c'est le deuxième reproche fait au film, la secrétaire d'Hitler a le second rôle, ce qui a pour conséquence que sur la fin, le film s'attarde trop longuement sur sa sortie de Berlin.
Au final, La Chute est un film important aux ambiances lourdes, fortes et dures, et qui n'oublie pas sur la fin de nous rappeller en chiffres les conséquences meurtrières du IIIème Reich.