3.5/10Babel

/ Critique - écrit par weirdkorn, le 10/11/2006
Notre verdict : 3.5/10 - C'est en quelle langue ? (Fiche technique)

Tags : babel tour anglais langue film dieu langues

C'est en quelle langue ?

L'histoire de la Tour de Babel est universellement connue. Les hommes, tous unis, avaient projetés de construire une tour si haute qu'elle atteindrait le ciel. Dieu, afin de contrecarrer leur entreprise, décida de multiplier les langages pour les séparer. Comme le langage des signes n'avaient pas encore été inventé, les hommes se dispersèrent et abandonnèrent leur projet. Fin de l'histoire. Laissons de côté l'aspect religieux et focalisons-nous sur l'imagerie symbolique de cet épisode biblique : les hommes ne se comprennent pas ! Les langues, cultures, moeurs ou religions ne sont qu'une des multiples façades de cette incompréhension mutuelle. Babel, le nouveau film d'Alejandro Gonzales Inarritu parle exactement de cela. Après Amours chiennes et 21 grammes, il signe un nouveau film construit de la même façon, entre destins entrelacés et style documentaire épileptique. Et le réalisateur a extrêmement bien réussi son pari tant il est hautement incompréhensible pour le commun des mortels.


Oeuvre minimaliste, expérimentale et élitiste, le film ravira un certain public amateur d'ovnis pompeux, grandiloquents et larmoyants mais risquera au mieux d'égarer le public en chemin, au pire de les tuer d'ennui. A l'instar de
Collision ou de 21 grammes, Babel raconte par l'intermédiaire d'histoires croisées des tranches de vie bouleversées par un événement extérieur. Seul problème, cela marche bien pour un même quartier mais c'est beaucoup moins concluant sur différents continents, surtout lorsque les liens sont aussi puissants que la réincarnation d'un tatou mexicain en un cerisier japonais. Certes, l'image est plus qu'exagérée mais n'est pas aussi éloignée que cela de la réalité. Ainsi, c'est avec circonspection que l'on suit les aventures d'une japonaise sourde muette, de deux enfants de l'Atlas, d'un couple d'Américains en vacances au Maroc et d'une nourrice clandestine mexicaine qui rentre chez elle pour le mariage de son fils avec les enfants dont elle a la garde. Bref, on voit de suite quelles sont les connexions et oui, celle au Japon ne sert à rien si ce n'est compliquer et rallonger. Ceci dit, le scénario devant tenir sur un post-it (juste recto), c'est une obligation de renforcer ces deux éléments.


Sur les plus de deux heures du film, au moins trois auraient pu être coupées. Rien ne se passe et le peu d'action semble aussi malvenu que démesuré. Les personnages réagissent en effet à chaque fois d'une manière inverse que la logique attendue. Forcément qu'ils se sentent incompris et perdus... Entre la Japonaise qui aime la nudité et le mâle américain dominant en train de râler pour un bus dont l'utilité demeure encore inconnue, il y a de quoi rester coi. Dommage pour un film qui se veut réaliste avec son style documentaire et minimaliste. Toutefois, cette impression d'incompréhension est parfaitement en phase avec un film qui multiplie les effets visuels et sonores expérimentaux où des scènes aussi provocantes qu'inutiles. Au final, le plus bizarre est d'avoir de grosses têtes d'affiche comme Brad Pitt et Cate Blanchett pour un tel ovni.

Babel n'est pas le genre à laisser indifférent. Il séduira autant qu'il dégoûtera. La faiblesse du scénario liée aux réactions insensées des personnages n'ont pas fait pencher la balance du bon côté de mon point de vue. Cela dit, le film comporte une intensité émotionnelle et une originalité cinématographique indéniables. Il faut se laisser tenter puis pouvoir l'assimiler. Encore une histoire de compréhension tout cela...