Arnaques, crimes & botanique
Cinéma / Critique - écrit par Kassad, le 26/12/2004 (Horticulture made in London
En France, Guy Ritchie est plus connu comme étant le mari de Madonna que comme metteur en scène de talent. Il faut avouer que ce n'est pas non plus la récompense qu'a reçu sa chère et tendre aux Razzie Awards (plus mauvaise actrice 2003 pour sa performance dans Swept away) qui milite pour lui... Pourtant détrompez-vous, Arnaques, crimes & botanique est un petit bijou déjanté, relativement inconnu de ce côté de la Manche, en provenance directe de Grande-Bretagne. Un thriller à la sauce humour noir, au même titre que le Christmas pudding, est un produit à la fois purement anglo-saxon mais en même temps (n'ayons pas peur des mots) à vocation universelle (de dégout dans le cas du pudding mais c'est une autre histoire).
Quatre copains font du "business" et vivotent à coups d'arnaques de bas étages dans les banlieues de Londres. Avec leurs petites combines, ils économisent suffisamment d'argent pour le prêter à l'un des leurs, Eddy, un as des cartes, en espérant un retour sur investissement rapide. Malheureusement au cours d'une partie truquée, en plus de perdre tout leur argent, Eddy et ses potes se retrouvent à la tête de 500 000 livres de dettes. Une dette à régler à un roi de la pègre, dont les modalités de recouvrement de créance sont disons... spéciales. Qui plus est, il leur faut trouver la somme avant la fin de la semaine.
Les références s'imposent immédiatement : coincé entre Tarantino, pour la tchatche et le verbe haut en couleur, Petits meurtres entre amis et Trainspotting, pour le côté "so british", Arnaques, crimes & botanique a, à première vue, du mal à se forger une identité. Pourtant, dès l'introduction, c'est à un véritable tourbillon auquel on assiste. A la fois en termes de scénario, on a du mal à saisir quelle direction va prendre le film, mais aussi en termes de prises de vues, virevoltantes et surprenantes (à noter l'excellent plan qui part de l'intérieur d'une soupe pour présenter un cuistot). Finalement on voit graduellement les différents morceaux de l'action se mettre en place et on n'est pas surpris par la tournure générale que prennent les événements. Et c'est justement là que se trouve la particularité de ce film : tant qu'on en reste aux généralités, au ton global du film, à l'ambiance, il est vrai que ce film n'apporte pas grand chose de neuf sous le soleil. Ce sont dans les détails, les répliques, les plans, les mini-gags (la manière dont un personnage se débrouille avec un fusil de chasse de deux mètres de long pour faire un casse par exemple), les accents (désolé de jouer au puriste pour certains mais la VO devrait être obligatoire) que se trouvent les points d'intérêts de cette production.
Même si l'humour reste toujours au premier plan, le côté polar sanglant resurgit de ci de là. Ainsi certaines scènes sont de purs moments de sadisme et font du film un objet à ne pas mettre entre toutes les mains (en tous cas pas les plus petites). Les personnages de truands sont bien campés et certains, Vinnie Jones par exemple, font vraiment froid dans le dos avec leur détachement le plus total alors qu'ils torturent à tour de bras. C'est peut être pour cette raison que Arnaques, crimes & botanique a eu du mal à trouver son public en dehors de l'Angleterre : il n'est ni inoffensif comme le serait une version du troisième millénaire des Tontons flingueurs, ni sérieux comme un polar traditionnel. Encore une fois c'est la comparaison avec Tarantino qui s'impose. Pourtant il y a quelque chose de fondamentalement différent, peut être est-ce par cette manière si britanique de ne pas montrer ses émotions et de rester flegmatique en toute situation. Imaginez un Pulp Fiction sans la démesure et l'emphase et vous trouverez Arnaques, crimes & botanique. Paradoxalement, ce côté zen au milieu du délire augmente l'efficacité des situations comiques.