6/10Amour & amnésie

/ Critique - écrit par Nicolas, le 04/07/2004
Notre verdict : 6/10 - Souviens-toi, l'automne dernier (Fiche technique)

Souviens-toi, l'automne dernier

Amour et Amnésie, c'est un peu comme si des collaborateurs accros l'un de l'autre avaient oublié leur précédent bide et s'étaient remis en tête de faire un film. Le dénominateur commun : Adam Sandler, « acteur » dans le registre « comique américain », au penchant très prononcé pour le gag d'assez mauvais goût et l'humour catégorie poids lourd. Les deux satellites gravitant autour de monsieur Saturday Night Live : Drew Barrymore, actrice du présent film, à qui il donne la réplique en 1998 dans une mièvre petite comédie sans grande envergure titrée Demain, on se marie ! ; et Peter Segal, réalisateur du présent film, qui le dirigera pour le faiblissime Self-control avec Jack Nicholson. Voilà, de quoi frémir, certes, mais inutile de vendre la peau de Sandler avant d'avoir vu son bide présumé ; tout du moins, c'est ce que je me suis dit, en bon détracteur du show-man. Et oh ! Surprise ! Le résultat est potable !

La vie était belle pour Henry Roth. Lorsqu'il ne soignait pas une tortue malade ou un morse un peu ballonné, il construisait son bateau qui le mènerait tout droit en Alaska. Et quand il ne construisait pas son bateau qui le conduirait tout droit en Alaska, il draguait les jolies touristes sans penser au lendemain. La règle était : pas de filles du coin (Hawaï), pour éviter les pièges amoureux. Jusqu'à ce qu'il rencontre Lucy, petite blonde au sourire ravageur qui lui tape sévère dans l'oeil. Par bonheur, le coup de foudre est réciproque, et Henry est rencardé pour le lendemain. Mais à l'heure du rendez-vous, la belle semble ne pas le reconnaître et l'envoie paître sévèrement. Bientôt, Henry est mis au parfum : après un terrible accident de voiture, la mémoire courte de Lucy est en proie à de sérieuses difficultés, et s'efface après chaque nuit. Persuadée chaque matin d'être le dimanche 13 octobre, elle va prendre son petit dej' chaque matinée au même endroit, elle repeint chaque jour le garage du papa, lui fête chaque jour son anniversaire, et regarde chaque soir Sixième sens avec sa famille qui fait tout pour ne pas la contredire. Et chaque jour, Henry va tout faire pour la reconquérir, avec l'espoir que le lendemain, elle se souvienne...

Jolie petite histoire, n'est-il pas ? Une légère dérivation de Un jour sans fin, réduit à la mémoire d'une seule et même personne qui ne parvient pas à se souvenir de la veille, condamnée à revivre éternellement la journée qui suivra son samedi 12 octobre. Mais le nom inscrit à la droite de Drew Barrymore est bien Adam Sandler, et la comédie romantique légère est donc à proscrire. Incroyable comment, sans pour autant toucher à l'écriture, Sandler parvient toujours à obtenir le même type de personnage : le brave type sympa et un peu niais. Incroyable aussi que Rob Schneider soit aussi toujours plus ou moins dans le coin. Bref, tout était presque réuni pour magnifier une jolie petite niaiserie qui m'aurait largement contenté dans l'expression de ma haine anti-Sandler. Pas de bol, car pas pour cette fois. A l'image des frères Farelly, le déficit physique ou psychologique devient ici une source de blagues plus ou moins drôles mais jamais offensantes. La journée type de Lucy et ses parents, notamment, est un petit régal d'humour un peu noir, organisation millimétrée du papa et du frérot qui retapent inlassablement une soirée d'anniversaire et une séance vidéocassette en faisant « comme si c'était la première fois ». Un père pas gâté non plus avec un fiston culturiste pas fute-fute qui ne manquera certainement pas de vous faire rire (et les plus perspicaces auront reconnu le brave Sam Gamegie avec un bon mètre en plus). Amusant également de voir Henry développer des trésors d'ingéniosité pour continuer à draguer la minette en toute impunité, jusqu'à simuler un pseudo-kidnapping ou une pseudo-agression. Le scénario s'égare parfois dans le romantique (la récurrence du "premier baiser"), plutôt bien mené, et dans le mini-mini-mini mélodrame (la maladie incurable) sans trop alourdir la comédie, et sans chercher à dénouer le tout d'une manière crédible et ordonnée. Rien à en apprendre en somme, juste de l'amusement, même si celui-ci ne touche pas à tous les coups, et reste plutôt conforme à la logique de tous les autres Sandler.

Une comédie fraîche et amusante, un exploit lorsque l'on connaît les penchants d'Adam Sandler, solidement portée par une idée plutôt originale (à défaut d'être crédible) qui se constitue comme le noeud humoristique du film. Bien exploitée, cette flamme donne au film ses moments les plus drôles et fait passer un excellent moment en compagnie d'un acteur plutôt mauvais qui fait royalement passer la pilule sans trop déborder.